cinemaSaje, l’entreprise chrétienne derrière « Sound of Freedom » en France

« Sound of Freedom » : Qu’est-ce que Saje distribution, l’entreprise chrétienne derrière le film en France ?

cinemaFondée par un catholique pratiquant, cette petite société a également distribué « Vaincre ou mourir », le premier film du Puy du Fou. Son fondateur déplore auprès de « 20 Minutes » les critiques sur ces films
Tim Ballard, troisième en partant de la gauche, à l'avant première de « Sound of Freedom » aux Etats-Unis.
Tim Ballard, troisième en partant de la gauche, à l'avant première de « Sound of Freedom » aux Etats-Unis. - Alberto E. Tamargo/Sipa USA/SIPA / Sipa
Mathilde Cousin

Mathilde Cousin

L'essentiel

  • «Sound of Freedom », un thriller éreinté par de nombreux critiques, sort ce mercredi en France, distribué par Saje production, une entreprise qui avait déjà mis à l’affiche « Vaincre ou mourir », le premier film du Puy du Fou.
  • Depuis une dizaine d’années, Hubert de Torcy, le dirigeant de Saje, bâtit un catalogue de films chrétiens, s’attirant parfois des polémiques.

«Pour la première fois, on se paye un film qui est numéro dix au box-office américain cette année. » Hubert de Torcy n’en revient toujours pas du succès « improbable » de Sound of Freedom outre-Atlantique. Une fréquentation record pour ce film défendu par Elon Musk ou Donald Trump, que le distributeur espère bien voir répliquée en France, où le film est sorti ce mercredi.

Avec ce thriller éreinté par de nombreux critiques, qui s’inspire des opérations controversées de sauvetage d’enfants menées par Tim Ballard, un Mormon, Saje distribution, la société d’Hubert de Torcy, continue sa conquête des salles obscures, au-delà des projections dans les sous-sols des églises catholiques et des salles paroissiales, son premier public. « Très clairement, c’est un film qui touche un public beaucoup plus large que le seul public chrétien, développe Hubert de Torcy auprès de 20 Minutes. Mais le message du film est essentiel : c’est cette phrase du Christ, ce que vous avez fait aux plus petits d’entre les miens, c’est à moi que vous l’avez faite. »

Des complotistes persuadés que le film n’allait pas sortir en France

La sortie du film s’accompagne d’un parfum de polémique : lorsque le film a connu le succès aux Etats-Unis cet été, des internautes français se sont alors autopersuadés que le film ne sortirait en France, trop « dérangeant » par son thème, la mise en scène d’un Mormon qui affirme sauver des enfants victimes de traites lors d’opérations spectaculaires. Pourtant, le film est bien à l’affiche de 215 salles ce mercredi.

S’il a eu quelques mois entre ces deux sorties, c’est parce qu’il a fallu tout simplement acquérir les droits pour le distribuer en France, relate Hubert de Torcy, qui a vu les « rumeurs » sur les réseaux sociaux. « Il y en a eu des choses bizarres, parce qu’il y a même eu soi-disant la ministre de la Culture qui aurait dit que le film n’arriverait pas en France… »

« Les vrais complotistes dans l’affaire, ce sont les journaux »

Le distributeur ne blâme pas les personnes qui ont relayé ce type de messages. Il pointe plutôt du doigt les médias : « Pour moi, les vrais complotistes dans l’affaire, ce sont les journaux. Je pense que ce type de rumeur naît aussi du traitement du film aux Etats-Unis, où le film a été accusé de complotisme. Le film ne parle de rien de ce qui est évoqué dans les articles. Un tel gap [écart] entre ce qui est écrit et ce qui est la réalité fait que les gens se demandent : ''Pourquoi les médias nous racontent ça ?" Et ça nourrit le complotisme. » La presse a surtout relaté les prises de position complotistes de l’acteur principal.

En octobre, selon la presse américaine, six femmes ont porté plainte contre Tim Ballard, dont l’histoire est romancée dans le film. Une situation qui n’a pas remis en cause le choix de distribuer le film en France : « Je n’en sais pas plus que vous sur cette situation, développe Hubert de Torcy. J’espère que la justice américaine tirera cela au clair. »

« J’ai toujours eu la foi »

En janvier, un précédent film défendu par Saje distribution, cette fois-ci en coproduction avec Studio Canal, s’était attiré les critiques d’historiens. Vaincre ou mourir, le premier film du parc du Puy du Fou, portait sur les guerres de Vendée, un thème encore mobilisateur dans certains cercles catholiques. Il y a deux ans, c’était la diffusion sur C8 d’Unplanned, un film qui adoptait « le point de vue des militants anti-avortement », qui avait mis brièvement en lumière la petite entreprise chrétienne. Le film avait fait un flop.

Des polémiques que le distributeur déplore : « Il y a des poussées d’acnée médiatique sur des films, souvent infondées, du moins de mon point de vue. »

La foi chrétienne est le fil conducteur d’Hubert de Torcy et de Saje depuis les débuts de l’entreprise, il y a presque dix ans. « J’ai toujours eu la foi », confie ce membre de la communauté de l’Emmanuel, dont une des missions est l’évangélisation, c’est-à-dire la propagation du message chrétien dans le monde. Ancien journaliste pour des revues chrétiennes et pour la chaîne KTO, Hubert de Torcy a eu un « déclic » il y a dix ans. « Je voyais, à partir des années 2013-2014, plein de films cartonner sur le marché américain, avec un super casting, et personne ne les sortait en France, se souvient-il. Je savais que je pouvais actionner des réseaux dans l’univers chrétien, j’ai des contacts dans les paroisses. J’ai tenté ma chance en 2014 avec Cristeros, qui a fait presque 100.000 entrées avec assez peu de moyens et une communication très ciblée. Le film a bluffé tout le monde, notamment les exploitants de salles, qui ont vu un public qu’ils ne voyaient pas habituellement. »

Depuis, le catalogue de ce diffuseur s’enrichit d’œuvres édifiantes : vies de saints, des papes, dessins animés pour les enfants sur Noël, documentaire sur des prêtres… Saje distribution va même piocher dans les productions protestantes évangéliques américaines. N’est-ce pas un paradoxe pour un catholique ? « Tous les films que l’on distribue ne sont pas catholiques, mais ils ne sont pas contraires à la foi commune des chrétiens », argue Hubert de Torcy.

L’entreprise s’est développée, travaillant comme une agence de communication et mettant à disposition son réseau dans les paroisses pour des films comme Reste un peu, où Gad Elmaleh raconte sa découverte de la foi chrétienne. Saje a aussi lancé une plateforme de VOD et travaille sur leur prochaine sortie dans les salles, Le Club des miracles, « une comédie dramatique irlandaise, amusante et en même temps profonde », dixit Hubert de Torcy. Cinéma, télévision, VOD, toutes les voies ne sont pas impénétrables pour ce diplômé d’HEC.