justiceLe cauchemar d’un couple d’Irlandais qui a contracté le botulisme à Bordeaux

Cas de botulisme à Bordeaux : Ces Irlandais « venaient passer un bon moment et ils ont failli perdre la vie »

justiceUn couple d’Irlandais intoxiqués au Tchin Tchin Wine Bar alors qu’il était en visite à Bordeaux pour la Coupe du monde de Rugby vient de porter plainte contre le restaurant. Leur avocat, Pierre Debuisson, raconte leur calvaire
Seize personnes ont été victimes de botulisme, dont l'une est décédée, après avoir consommé des sardines mal stérilisées dans un restaurant du centre-ville de Bordeaux.
Seize personnes ont été victimes de botulisme, dont l'une est décédée, après avoir consommé des sardines mal stérilisées dans un restaurant du centre-ville de Bordeaux.  - UGO AMEZ / SIPA
Elsa Provenzano

Elsa Provenzano

L'essentiel

  • Un couple d’Irlandais, atteint botulisme après un repas dans un restaurant bordelais en septembre dernier, vient de déposer plainte contre l’établissement.
  • Les deux trentenaires ont été hospitalisés et l’un d’eux a frôlé la mort. Ils ont encore d’importantes séquelles et n’ont pas pu reprendre une vie normale.
  • Leur avocat s’indigne du fait que, plus de deux mois après les faits, aucun juge d’instruction n’a été nommé pour diligenter des investigations sérieuses, dans ce dossier de santé publique.

Caitriona et Eoghan, un couple d’Irlandais de 36 ans, avaient organisé leur déplacement dans la capitale girondine à l’occasion de la Coupe du monde de rugby. Mais leur dîner au « Tchin Tchin Wine bar » le 10 septembre, où ils vont se partager un bocal de sardines mal stérilisées, va faire virer leur séjour au cauchemar.

« Ils venaient passer un bon moment et ils ont failli perdre la vie », résume leur avocat Pierre Debuisson qui annonce qu’une plainte a été déposée contre le restaurant pour « tromperie », « administration de substances nuisibles », « commercialisation de denrées dangereuses pour la santé », « mise en danger de la vie d’autrui » et « blessures involontaires ». Quinze cas de botulisme alimentaire ont été recensés en lien avec les sardines servies dans ce restaurant bordelais, et une jeune femme est décédée.

Héliportés depuis Lacanau

Dès le lendemain de leur dîner au « Tchin Tchin Wine bar » de violents symptômes assaillent Eoghan, qui a mangé avec davantage d’appétit que sa compagne, alors qu’ils sont à Lacanau. Il est pris de vertiges, sa vision se trouble et il se sent happé par une fatigue extrême. Son amie, paniquée, trouve de l’aide auprès d’une pharmacie qui la met en contact avec un médecin. Alerté par les signes, dans le contexte connu de l’intoxication collective au botulisme, le Samu envoie un hélicoptère.

A l’hôpital Pellegrin, « il a été immédiatement intubé et placé dans le coma, raconte son conseil. Ses médecins ont dit à sa compagne qu’ils avaient failli le perdre. » Alors qu’il est sur le point de s’asphyxier, ils réalisent une trachéotomie en urgence. « Il a été placé en réanimation après le coma, cela a duré des semaines », ajoute Pierre Debuisson. Il souffrait de troubles de la vue, de l’équilibre, se retrouvait dans l’impossibilité de marcher, avait des difficultés pour respirer ou déglutir. Sa compagne souffrait des mêmes symptômes mais à un degré plus faible, notamment parce qu’elle avait consommé moins de sardines.

Encore loin d’avoir une vie normale

Plus de deux mois après les faits, Eoghan vient tout juste de sortir de l’hôpital de Cork, en Irlande, et, aucun des deux trentenaires n’a pu reprendre une activité professionnelle normale après avoir contracté cette affection neurologique grave. Ils souffrent encore aujourd’hui de séquelles physiques : ils ont des pressions sanguines faibles, sont victimes d’étourdissement, de vertiges, de problèmes digestifs et pulmonaires. Ils doivent aussi faire face à des troubles de la mémoire, de la concentration et à la sensation « d’être embrumés », rapporte leur avocat. Celui-ci met aussi en avant un « préjudice d’angoisse fort » après cette mésaventure qui aurait pu leur coûter la vie. Ils ne vont évidemment plus au restaurant mais vérifient aussi la composition de tout ce qu’ils ingèrent, nettoient plus que de raison et sont victimes d’angoisses nocturnes.

« Ils ont frôlé la mort mais aujourd’hui il n’y a toujours pas de juge d’instruction désigné au tribunal judiciaire de Bordeaux, s’indigne leur conseil. C’est une aberration car seul un juge d’instruction a la possibilité de diligenter toutes les investigations nécessaires pour comprendre l’enchaînement d’événements qui a conduit à ce drame. » Le couple n’a pas été entendu dans le cadre de l’enquête et se sent abandonné par la justice française.