Gros moteurPrivés d’aides au carburant, les gros pêcheurs touchent le fond

Prix des carburants : « 220.000 euros de gazole par semaine »… Les gros pêcheurs touchent le fond

Gros moteurLes patrons des gros armements bretons se réunissent ce lundi en marge des assises de la mer
Les patrons des gros armements de pêche bretons protestent contre le plafonnement des aides au carburant.
Les patrons des gros armements de pêche bretons protestent contre le plafonnement des aides au carburant. - M. Pattier/Sipa / Sipa
Camille Allain

C. A. avec AFP

Les gros sont lésés. Confrontés depuis plusieurs mois à la hausse du prix des carburants, les pêcheurs peuvent prétendre à des aides conséquentes de la part de l’État français. Censées s’arrêter à l’automne, ces aides ont finalement été prolongées comme l’avait promis Hervé Berville. Après avoir annoncé la fin de ces aides au carburant, le secrétaire d’État à la Mer avait effectué un joli rétropédalage face à la grogne de la profession. Mais dans les ports, la colère est toujours bien présente chez certains pêcheurs. Enfin, surtout chez les patrons des plus gros armements, qui ont déjà atteint le plafond fixé par la Commission européenne et ne peuvent plus toucher ces aides. « On veut nous laisser crever à bas bruit ! », dénoncent ces patrons, qui emploient quelque 800 marins-pêcheurs en Bretagne.

Pour alerter sur leur situation, les huit plus gros armements bretons, comptant une soixantaine de chalutiers et 800 marins, se réunissent lundi après-midi à Lorient (Morbihan), à la veille de la venue d’Emmanuel Macron aux assises de la Mer à Nantes.

Une aide de 20 centimes par litre de carburant

L’armement Porcher fait partie des armements dits « structurés », c’est-à-dire qu’il compte plusieurs bateaux. Chaque semaine, il dépense « 220.000 euros de gazole » et a rapidement explosé son quota d’aides. Mis en place en mars 2022, après la flambée des prix de l’énergie provoquée par la guerre en Ukraine, ce dispositif permet aux pêcheurs de toucher une aide de 20 centimes par litre de carburant. Un système qui est cependant limité à 300.000 euros par entreprise, peu importe le nombre de bateaux. « Nous avons atteint le plafond en août 2022. Les aides, on les a consommées en quatre mois environ », raconte ainsi Christophe Collin, directeur de l’armement bigouden au Guilvinec (Finistère), qui compte neuf chalutiers hauturiers.

Les marins aussi pâtissent de ces hausses, eux qui sont payés à la part, en fonction du prix de vente de poisson, une fois les charges déduites. « Grosso modo, ils perdent 400 à 500 euros sur une marée de 14 jours », estime Ludovic Le Lay, qui pointe une « distorsion de concurrence profondément injuste » avec les chalutiers artisanaux qui n’ont pas encore dépassé le plafond.

Les relèvements successifs du plafond (il va encore être relevé à 335.000 euros au 1er janvier) ont été un soulagement éphémère pour ces gros armements. « Le gazole peut représenter jusqu’à 40 % de notre chiffre d’affaires », témoigne Ludovic Le Lay, directeur de l’armement Hent ar Bugale à Loctudy (Finistère). « Il y a encore des moyens de s’en sortir », concède-t-il, « si les prix sont en notre faveur [lors des enchères à la criée]. Mais on perd surtout énormément d’argent. » Mercredi, l’armement Via Océan (ex-Saupiquet), basé à Concarneau (Finistère) et dont les trois bateaux pêchent le thon tropical dans l’Atlantique, a annoncé un projet de « cessation définitive de ses activités » en raison notamment de la « très forte hausse de ses coûts ».

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