arbitreLa Cour suprême accepte d’examiner la question de l’inéligibilité de Trump

Présidentielle américaine 2024 : La Cour suprême accepte d’examiner la question de l’inéligibilité de Donald Trump

arbitreAlors que le Colorado a déclaré que l’ancien président n’était « pas apte » à être sur les listes électorales pour avoir participé à une « insurrection », la Cour suprême se penchera sur la question le 8 février
Donald Trump le 17 décembre 2023 à Reno dans le Nevada.
Donald Trump le 17 décembre 2023 à Reno dans le Nevada. - Godofredo A. Vásquez/AP/SIPA / SIPA
Philippe Berry

Philippe Berry

Ce sera l’une des décisions judiciaires les plus importantes de l’histoire de la démocratie américaine. Vendredi, la Cour suprême des Etats-Unis a accepté de se saisir de la question de l’inéligibilité de Donald Trump, alors que le Colorado a estimé que l’ancien président américain n’était « pas apte » à être inscrit sur les listes de la primaire républicaine pour avoir participé à « une insurrection » lors de l’assaut du Capitole.

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L’instance a fixé au 8 février l'audience pour écouter les arguments des deux camps. Une course contre la montre est engagée : la primaire républicaine du Colorado doit se dérouler le 5 mars. Et les enjeux sont énormes : la décision de la Cour suprême dictera non seulement si le Colorado est dans son bon droit, mais si d’autres Etats peuvent, comme le Maine l’a fait, suivre et déclarer Donald Trump inéligible en vertu du 14e amendement de la Constitution. Un point sur lequel il n’y a pas de consensus chez les experts en droit constitutionnel.

« J'espère bénéficier d'un traitement équitable », a réagi vendredi soir Donald Trump dans l'Iowa.

Terrain favorable pour Donald Trump

Dans le Colorado, l'instance qui a déclaré Donald Trump inéligible par un vote 4-3, était constituée de 7 juges nommés par des gouverneurs démocrates. A la Cour suprême des Etats-Unis, en revanche, les conservateurs ont une large majorité 6-3, avec trois juges nommés par Donald Trump (Gorsuch, Kavanaugh et Coney Barrett).

Le 14e amendement de la Constitution des Etats-Unis a été adopté en 1868 après la guerre de Sécession. Il stipule qu’un responsable politique, militaire ou judiciaire ne pourra plus occuper de telles fonctions s’il « a pris part à une insurrection ou à une rébellion ».

La Cour suprême devra principalement trancher trois points:

  • Le président des Etats-Unis, qui n'est pas explicitement cité dans le texte, est-il bien un « officier des Etats-Unis»: à moins de couper les cheveux en quatre, l'avocat conservateur anti-Trump George Conway estime que c'est bien le cas, avec la position désignée comme « the office of the president of the United States ».
  • Donald Trump a-t-il « participé à une insurrection » avec son discours précédant l'assaut du Capitole dans lequel il appelait ses supporteurs à « se battre comme des diables» et à « marcher » vers le Capitole tout en parlant ensuite de « marche pacifique pour faire entendre votre voix ».
  • Le 14e amendement est-il « self executing »: la question est de savoir s'il peut être directement invoqué par un Etat, ou s'il faut une loi ou un vote du Congrès pour déclarer une personne inéligible.

Incertitude

A ce stade, difficile de prédire de quel côté la Cour suprême penchera. Les juges du Colorado ont pris soin de rédiger leur décision en épousant une vision « originaliste » de la Constitution chère aux conservateurs, selon laquelle le texte doit s'interpréter dans le contexte de la vision des pères fondateurs au 19e siècle.

Le patron de l'instance, John Roberts, a, lui, parfois voté avec les progressistes, et en 2012, Neil Gorsuch (avant qu'il soit à la Cour suprême), avait tranché qu'un Etat pouvait déclarer un candidat inéligible dans certaines circonstances. De quoi, potentiellement, ouvrir la voie à une courte majorité 5-4 contre Donald Trump.

« Il est probable, à mes yeux, que la Cour retoque la décision du Colorado », estimait toutefois pour 20 Minutes l'avocat Brad Moss avant les fêtes. « Soit en interprétant que la section 3 du 14e amendement ne concerne pas la présidence, soit, comme l’a fait le Michigan, en concluant qu’il s’agit d’une question politique et pas judiciaire. »

Pour la Cour suprême, ce n'est sans doute que le début. Les neuf juges pourraient également être amenés à trancher la question d'une potentielle immunité judiciaire de Donald Trump d'ici son premier procès fédéral, censé démarrer début mars.