King kongComment le plus grand primate de tous les temps a-t-il disparu ?

Comment le plus grand primate de tous les temps a-t-il disparu de la surface du globe ?

King kongHaut de trois mètres et lourd de 200 à 300 kg, le singe gigantopithèque a disparu il y a plus de 200.000 ans
Le singe gigantopithèque était deux fois plus grand que le gorille, plus grand primate vivant, ne l'est.
Le singe gigantopithèque était deux fois plus grand que le gorille, plus grand primate vivant, ne l'est. - Philippe Clément/Canva / Canva
20 Minutes avec AFP

20 Minutes avec AFP

Avec ses trois mètres de haut, le singe gigantopithèque fait pâle figure face à King Kong, une créature de plusieurs dizaines de mètres de haut. Néanmoins, l’espèce, aujourd’hui disparue, n’a pas usurpé son nom de géant. D’après une étude parue ce mercredi, le grand singe (au sens littéral), a prospéré dans les forêts d’Asie avant d’être rayé de la surface de la Terre il y a plus de 200.000 ans, faute d’avoir su s’adapter au changement de son environnement.

Analyse de dents fossilisées

L’extinction du plus grand primate de tous les temps – 3 mètres, 200 à 300 kg – était l’une des grandes énigmes de la paléontologie depuis la découverte des premières traces de la bête dans les années 1930. « Gigantopithecus blacki » n’a laissé derrière lui que quelques mâchoires et des dents, retrouvées par centaines dans des grottes de la province de Guangxi, dans le sud de la Chine.

Mais malgré dix ans de fouilles, les scientifiques n’arrivaient pas à déterminer quand et pourquoi l’espèce s’était éteinte, explique le professeur Yingqi Zhang de l’Institut de paléontologie de l’Académie chinoise des sciences, coauteur de l’étude. Plutôt que d’enquêter site par site, une équipe de scientifiques chinois, australiens et américains a travaillé sur un ensemble de 22 grottes en Chine – dont certaines n’avaient encore jamais été fouillées – contenant des dents fossilisées : des plus anciennes, vieilles de 2 millions d’années, au plus récentes, il y a environ 250.000 ans.

La vaste période des cycles glaciaires

Ils y ont combiné six différentes méthodes de datation, dont l’analyse des sédiments par luminescence, qui permet de savoir quand ces dépôts ont été exposés pour la dernière fois à la lumière du jour. Mais aussi la datation des pollens, précieux indices de l’évolution de la végétation, le tout afin « d’avoir une chronologie complète de l’environnement de chaque site, y compris ceux où Gigantopithecus blacki n’apparaissait plus », explique le Pr Joannes-Boyau, expert en géochimie.

Leurs résultats ont permis de déterminer une « fenêtre d’extinction » de l’espèce : entre 295.000 ans et 215.000 ans. Ce qui correspond à une vaste période de cycles glaciaires dite du Pléistocène moyen, où la planète a connu un refroidissement global. Conséquence : dans les forêts tropicales luxuriantes où prospérait le colosse, des saisons plus contrastées ont « transformé la végétation et entraîné des périodes de pénurie de fruits », décrypte la chercheuse Kira Westaway de l’Université Macquarie en Australie, également coautrice.

Une taille handicapante

Gigantopithecus blacki, qui évoluait au sol, a vu sa zone de recherche de nourriture se clairsemer et s’est rabattu sur des écorces et des brindilles. « Il a commis une énorme erreur en se spécialisant sur ces aliments de secours, très fibreux et moins nutritifs », détaille Yingqi Zhang dans un entretien à l’AFP à Pékin.

Sa trop grande taille a freiné l’agilité nécessaire pour trouver des ressources plus variées. Ce handicap n’a fait qu’empirer car « de façon surprenante, sa taille a augmenté » au fil du temps, remarque Kira Westaway. Subissant un « stress chronique sur le long terme » – qui se lit dans la dentition –, la population s’est peu à peu réduite et l’espèce a fini par s’éteindre… Car une grande taille n’est pas toujours synonyme d’une grande survie. Une leçon qu’avait aussi apprise Kong à ses dépens dans le film de Peter Jackson, sorti en 2005.