NOMANCEPourquoi les Z en ont ras le cul de l’amour et du sexe dans les séries

« Puriteens », « nomance »… Pourquoi les Z en ont ras le cul de l’amour et du sexe dans les séries

NOMANCELa génération Z préfère regarder des histoires d’amitié plutôt que des histoires d’amour
Zendaya (Rue) et Hunter Schafer (Jules) dans « Euphoria » sur HBO
Zendaya (Rue) et Hunter Schafer (Jules) dans « Euphoria » sur HBO - Copyright 2020 Home Box Office, Inc. All Rights Reserved. / HBO
Laure Beaudonnet

Laure Beaudonnet

L'essentiel

  • Selon une enquête du Center of Scholars and Storytellers de l’université de Californie (UCLA) en octobre dernier, les 13 à 24 ans veulent davantage d’histoires platoniques dans les œuvres de fiction.
  • L’industrie de Hollywood a encore du mal à penser l’adolescence sans y intégrer de l’amour et du sexe. Mean girls, Lolita malgré moi, sorti la semaine dernière, est un nouvel exemple de l’importance du romantisme dans les teen dramas.
  • Portrait d’une génération Z moins centrée sur l’amour et le sexe.

Les teen drama sont-ils en train de se mettre à dos les ados ? Une chose semble se dessiner : ils ne répondent plus aux attentes des Z (nés entre 1997 et 2010), généralement plus intéressés par les « nomances » (entendre fictions sans romance). Selon une enquête du Center of Scholars and Storytellers de l’université de Californie (UCLA) en octobre dernier, les 13 à 24 ans veulent davantage d’histoires platoniques. Difficile d’imaginer Sex Education, Mes premières fois ou Euphoria sans une petite partie de jambes en l’air, plus ou moins explicite.

Dernier exemple en date : Mean Girls, Lolita malgré moi, dont le scénario est signé Tina Fey. Le blockbuster adolescent, remake du film de 2004 sorti la semaine dernière sur grand écran, raconte l’arrivée de Cady Heron au lycée et sa relation compliquée avec Regina George, la reine des « Plastiques » qui devient sa principale rivale. Toutes les deux se disputent Aaron (Christopher Briney, le beau ténébreux de L’Eté où je suis devenue jolie). Du classique en somme… La plupart des œuvres qui s’adressent aux adolescents investissent le champ de l’amour, ouvrant la discussion sur l’orientation sexuelle, la première fois, l’identité de genre…

Des relations à distance

En 2019, la pépite britannique Sex Education était saluée pour sa façon de parler de sexualité sans honte, libérant une parole verrouillée sur les pratiques des ados. Alors, pourquoi les jeunes ne voudraient plus, subitement, regarder d’histoires d’amour ? Peut-être faut-il regarder du côté des habitudes des Zoomers pour comprendre ce désamour. « Nous savons que les jeunes souffrent d’une épidémie de solitude et cherchent des modèles dans l’art qu’ils consomment », explique Dr Yalda T. Uhls, coautrice de l’étude, dans l’article de l'UCLA.

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« J’ai constaté dans mes enquêtes récentes une désacralisation de la pénétration, pointe en septembre dernier la sociologue française Janine Mossuz-Lavau, sociologue spécialiste de la sexualité et autrice de La vie sexuelle en France (La Martinière, 2018) dans le podcast « Tout s’explique » de 20 Minutes. Sont considérés comme relations sexuelles aussi bien la pénétration, les caresses, mais ça ne correspond pas forcément à la définition de la relation sexuelle classique qui était la pénétration. Des tas de choses qui étaient considérées comme des préliminaires sont maintenant considérées comme de la sexualité à part entière ». La sociologue pointe aussi le Covid-19 qui a été un facteur supplémentaire d’inhibition du désir sexuel : « Ça a généré l’idée terrible que les autres sont dangereux pour moi. La peur de l’autre ne vous incite pas à vous jeter dans ses bras. »

« Alors que les scénaristes utilisent le sexe et la romance comme un raccourci pour créer une connexion entre les personnages, il est important que Hollywood prenne conscience que les adolescents veulent des histoires qui représentent l’ensemble des relations, insiste Dr Yalda T. Uhls. Selon elle, les récentes études montrent que les jeunes font moins l’amour que leurs aînés et préfèrent, pour nombre d’entre eux, rester seuls. Un article du Wall Street Journal de 2019 confirme cette hypothèse. L’auteur a rencontré une génération qui préfère les rendez-vous galants à distance et qui n’a aucun mal à se dire en couple avec une personne qu’elle n’a jamais rencontrée IRL. Résultat : la genZ ne met plus les relations intimes au cœur de ses préoccupations. En France, un sondage Ifop datant du mois de juillet a fait le même constat : 43 % des jeunes de 18 à 25 ans n’ont pas eu de relation sexuelle en 2022.

Les « puriteens », minorité ou réalité générationnelle ?

On le sait, l’omniprésence des écrans et des échanges virtuels a bouleversé les relations sociales des plus jeunes. Ils préfèrent se réfugier derrière leur smartphone que se confronter à un échange de vive voix. Mais pas seulement. Un tournant politique s’est opéré. Aux Etats-Unis, le terme « puriteens » (contraction de puritains et adolescents en anglais) a émergé sur X (anciennement Twitter) pour désigner « les jeunes en ligne sensibilisés au langage et à la politique sur l’identité de genre qui ont tendance à apostropher ceux qui ne répondent pas à cette norme », définit un article de The Rolling Stone paru en 2021. Difficile de savoir, nuance le magazine culturel américain, s’il s’agit d’une simple minorité bruyante sur les réseaux sociaux ou d’un trait de caractère qui se retrouve chez tous les Z. En tout cas, 45 % des 10-24 ans interrogés dans l’étude de l'UCLA considèrent que les scènes de sexe n’apportent rien à l’intrigue et 39 % d’entre eux veulent voir plus de personnages aromantiques et asexuels à l’écran. Sex Education a d’ailleurs fait entrer un personnage asexuel dans la saison 4.

L’industrie des séries a entamé le virage politique sur les représentations queers. Euphoria offre un de ses rôles principaux à une adolescente trans (Jules). Sans oublier le carton queer Heartstopper qui raconte l’histoire d’amour entre Charlie Spring, un ado introverti et rêveur, et son camarade de lycée, le populaire rugbyman Nick Nelson. Prochaine étape, les teen dramas passent aux amitiés platoniques ? Si elles veulent continuer à intéresser les ados, elles devront en tout cas se transformer (n’en déplaise à l’autrice de ces lignes).

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