scandaleL’imprégnation de la population antillaise au chlordécone encore mesurée

Chlordécone aux Antilles : Lancement d’une nouvelle étude pour mesurer l’imprégnation de la population

scandaleLe chlordécone, pesticide répandu dans les bananeraies pour lutter contre le charançon, a été autorisé en France de 1972 à 1990, et même jusqu’en 1993 aux Antilles
Pulvérisation de chlordécone sur des bananeraies en Guadeloupe.
Pulvérisation de chlordécone sur des bananeraies en Guadeloupe. - GILLES MOREL/SIMAX/SIPA / SIPA
20 Minutes avec agences

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La population antillaise va faire l’objet d’une nouvelle étude. Cette dernière va mesurer en Guadeloupe et en Martinique « l’évolution de l’imprégnation » de la population au chlordécone et à d’autres pesticides comme le glyphosate, ainsi qu’à des métaux lourds comme le plomb, selon une annonce de Santé publique France (SpF).

« Cette nouvelle étude est importante pour améliorer les connaissances afin de poursuivre et renforcer les mesures de prévention de l’exposition » au « chlordécone et autres polluants aux Antilles, avec des mesures d’accompagnement adaptées », a exposé l’agence sanitaire dans un communiqué publié lundi soir. Cette étude portera sur plus de 3.000 personnes tirées au sort et acceptant d’y participer, dont 700 enfants d’au moins 6 ans, et se déploiera de janvier à juillet en Guadeloupe continentale et en Martinique.

Du chlordécone dans le sang de nombreux Antillais

L’objectif est notamment de « mesurer l’évolution des niveaux d’imprégnation de la population au chlordécone, 10 ans après la première étude », et « d’évaluer l’imprégnation à une sélection d’autres molécules (pesticides et métaux lourds), dont certains pour la première fois comme le glyphosate, les métabolites des pyréthrinoïdes (insecticides) et plusieurs métaux lourds (plomb, arsenic, mercure) », a détaillé SpF.

La précédente étude a montré que plus de 9 Antillais sur 10 avaient du chlordécone détectable dans le sang et que 14 % des adultes en Guadeloupe et 25 % en Martinique dépassaient le seuil au-delà duquel des effets sont possibles sur la santé.

L’étude vise aussi à identifier les facteurs associés au niveau d’imprégnation élevé dans la population ou à étudier l’imprégnation des plus sensibles (enfants et femmes en âge de procréer) et plus exposés (travailleurs agricoles, pêcheurs, résidents en zone contaminée). « Nous avons sur-échantillonné certaines populations, soit plus à risque d’être exposées, soit plus fragiles », a précisé à l'AFP Jacques Rosine, responsable de la cellule régionale Antilles de SpF. Cette demande avait largement été relayée par des associations féministes et des pêcheurs, mobilisés au sein du collectif Lyannaj pou dépolyé Matinik. Et « nous travaillons pour la première fois sur l’imprégnation des enfants », a-t-il relevé.

Le chlordécone, un scandale sanitaire

« La participation du plus grand nombre est indispensable pour la réussite de cette étude », a insisté la directrice générale de SpF, la Dre Caroline Semaille, soulignant son intérêt pour la population antillaise. Selon l’agence sanitaire, cette nouvelle étude permettra aussi de mieux cibler la prévention à la contamination, en précisant notamment les pratiques alimentaires. Les résultats seront communiqués « fin 2025 ou début 2026 », selon le responsable de la cellule régionale Antilles.

Le chlordécone, pesticide répandu dans les bananeraies pour lutter contre le charançon, a été interdit aux Etats-Unis dès 1975, mais autorisé en France de 1972 à 1990, et même jusqu’en 1993 aux Antilles, où il a bénéficié d’une dérogation. S’ils ont reconnu un « scandale sanitaire », des juges d’instruction du pôle santé du tribunal judiciaire de Paris ont prononcé début 2023 un non-lieu dans l’enquête sur l’empoisonnement des Antilles au chlordécone, mettant fin à une information judiciaire ouverte en 2008. Indignées, les parties civiles ont fait appel.

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