energiePourquoi le prix du gaz n’est pas près de s’arrêter de flamber

Prix du gaz : Pourquoi les tarifs ne sont pas près de s’arrêter de flamber

energieUne hausse de la facture de gaz est prévue pour juillet prochain, et on vous spoile un peu, ce ne sera pas la dernière. Le prix risque d’augmenter encore et encore dans les années à venir
Courage, les factures vont être encore particulièrement salées.
Courage, les factures vont être encore particulièrement salées.  -  Monkey Business Images /  Monkey Business Images
Jean-Loup Delmas

Jean-Loup Delmas

L'essentiel

  • Vous avez aimé la hausse du prix de l’électricité en février ? Et hop, ce sera aussi le cas du gaz en juillet prochain
  • Autant vous y habituer, puisque l’énergie – et particulièrement le gaz – risque de toujours plus augmenter dans les années à venir.
  • A l’origine de ces hausses, un cercle vicieux quasi-instoppable : plus la demande baisse, plus les prix augmentent, et donc plus la demande baisse.

Coup de Trafalgar pour les consommateurs. Après avoir demandé aux Français de baisser leur consommation d’énergie par crainte d’une pénurie de gaz russe à l’été 2022, le gouvernement a justifié ce dimanche une hausse du prix du gaz… en raison de la baisse de la consommation. Et pour cause, l’appel du gouvernement avait été bien reçu. Le gestionnaire du réseau français de gaz a ainsi estimé en novembre que la demande, hors industries et centrales, a plongé de 9,5 % entre le 1er août 2022 et le 31 juillet 2023 (en données corrigées du climat) par rapport à la même période 2018-2019. Récompense pour le consommateur bon élève : une hausse de la facture prévue en juillet prochain, de 5,5 % à 10,4 % selon les foyers. Et merci.

« Comme on a toujours autant besoin des tuyaux et qu’on a la même exigence de qualité et de sécurité, si on répartit les dépenses d’utilisation du réseau sur moins de consommation, forcément, consommateur par consommateur, ça fait un tout petit peu plus », a ainsi expliqué Emmanuelle Wargon, présidente de la Commission de régulation de l'énergie dimanche.

Et ça continue encore et encore, c’est que le début, d’accord d’accord

La facture de gaz dépend de trois critères, résume Nicolas Golberg, associé Energie chez Colombus Consulting : les taxes, le prix de la molécule de gaz et l’entretien du réseau. Or, ce dernier « est un coût fixe, détaille l’expert. Quelle que soit votre consommation de gaz, le tuyau arrive toujours chez vous. Il faut donc payer ce coût fixe avec moins de consommateurs ».

Et après ce coup de Trafalgar, attention au Waterloo qui pourrait suivre. Le prix du gaz devrait continuer à flamber dans les prochaines années suivant cette même logique. Nicolas Golberg annonce la couleur : « En raison de la transition énergétique, on va consommer beaucoup moins de gaz à l’avenir, donc le prix de ce dernier va encore augmenter pour entretenir le réseau. Ou alors, on va se tourner vers de nouveaux gaz moins polluants mais plus cher. » Dans les deux cas, comptez sur de (nouvelles) hausses de la facture.

Chaque composant de la facture risque d’augmenter

D’autant que ces gaz plus vertueux vont demander deux ou trois adaptations du réseau de transport, comme l’indique Patrice Geoffon, professeur au Laboratoire d’Economie de Paris-Dauphine. « Une grande transformation est déjà en cours afin d’injecter du biogaz dans les réseaux, notamment ceux produits en milieu agricole, et, plus tard sans doute, de transporter de l’hydrogène. »

Le prix de la molécule, lui, ne risque pas non plus de consoler les foyers, mais plutôt de faire pleurer dans les chaumières. Patrice Geoffon annonce le non-retour des jours heureux : « Il est d’ores et déjà acquis que la molécule de gaz coûtera plus cher qu’avant le début du conflit en Ukraine ».

Pour les taxes non plus, point de salut. Troisième cavalier de l’énergie à nous prévoir l’apocalypse des prix, Nicolas Leclerc, cofondateur du cabinet de conseil en énergie Omnegy : « Le gouvernement a envie de maintenir ses recettes fiscales, voire de les augmenter, donc il va forcément faire grimper les taxes pour compenser le nombre plus faible de consommateurs. On part au moins sur quatre années d’augmentation du prix du gaz ».

Des foyers isolés ou des prix hauts

Une mauvaise nouvelle n’arrivant décidément jamais seule, Nicolas Leclerc élargit la focale. « Cela va être la même chose pour le pétrole, l’électricité. Avec des usages à la baisse, le coût par consommateur va exploser, entre les taxes plus chères et l’entretien du réseau ». C’est un cercle vicieux : plus le prix augmente, plus la consommation diminue, donc plus le prix augmente…

Face à cet avenir bien sombre, « les foyers au gaz devront faire attention à bien améliorer l’isolation et de vérifier leur chauffage avec l’explosion des prix », prévient Nicolas Golberg. Mais les consommateurs électriques le savent bien, eux qui viennent de subir une hausse des tarifs en février, ils ne sont pas non plus sortis d’affaires.

« Il faut avoir à l’esprit qu’il ne sera pas possible d’électrifier tous les usages du gaz, et que le prix de l’électricité lui-même a vocation à augmenter. En raison des investissements à réaliser dans le nucléaire, les renouvelables, les réseaux… », avertit donc Patrice Geoffon. « Compte tenu de l’évolution générale du prix des énergies, il est impératif d’avancer dans la rénovation thermique des logements, pour que les factures restent soutenables. » Allez, bon courage.