AllODes clandestins libérés à cause de téléphones en panne

Des clandestins libérés à cause de téléphones en panne

AllOLe juge des libertés et de la détention a remis en liberté sept personnes détenues en centre de rétention administrative en vue de leur expulsion du territoire
Les personnes en instance d'expulsion et retenues en CRA doivent pouvoir accéder librement à un téléphone (illustration).
Les personnes en instance d'expulsion et retenues en CRA doivent pouvoir accéder librement à un téléphone (illustration). - Action Press/Shutterstock/SIPA / Sipa
Mikaël Libert

Mikaël Libert

L'essentiel

  • Samedi, sept étrangers en situation irrégulière ont été relâchés du centre de rétention administrative de Lille, dans le Nord.
  • Le juge des libertés a estimé que leurs droits fondamentaux avaient été bafoués en raison de l’impossibilité qu’ils rencontraient de pouvoir communiquer librement avec leurs proches.
  • En effet, un article du Code de l’entrée et du séjour précise que chaque personne placée en centre de rétention doit pouvoir accéder librement à un téléphone. Au CRA de Lille, quatre appareils sur cinq ont été dégradés et sont inutilisables.

Samedi, sept personnes, en situation irrégulière en France, ont été libérées du centre de rétention administrative (CRA) de Lille-Lesquin par le juge des libertés et de la détention (JLD). Selon nos confrères du Figaro, le juge a motivé sa décision par l’impossibilité que les sept clandestins avaient d’accéder librement à un téléphone. Un argument surprenant mais bel et bien inscrit dans le Code de l’entrée et du séjour.

Que s’est-il passé samedi ?

Sept étrangers condamnés à une obligation de quitter le territoire français (OQTF) ont comparu, samedi, devant le juge des libertés et de la détention. Une étape obligatoire pour chaque personne placée en centre de rétention administrative (CRA) en vue de son expulsion ou dans l’attente de l’examen de sa demande d’asile.

Face au juge, les personnes peuvent être assistées d’un avocat qui va plaider leur cause, du moins leur demande de remise en liberté. Dans le cas de ces sept clandestins, l’avocat commis d’office a justifié sa demande de libération en argumentant que ses « clients » ne pouvaient pas librement accéder à un téléphone.

Le droit de communiquer

Si l’argument peut sembler fantaisiste, il ne l’est pas du tout. En effet, selon le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, l’article Article L744-4 précise effectivement que « l’étranger placé en rétention est informé dans les meilleurs délais qu’il […] peut communiquer avec son consulat et toute personne de son choix ».

Ce droit à communiquer doit être rendu techniquement possible et le Conseil d’Etat a été clair à ce sujet, précisant qu’il faut au minimum « un téléphone en libre accès pour cinquante retenus ». Une disposition qui pourrait être inutile si les retenus pouvaient conserver leurs téléphones portables, ce qui n’est souvent pas le cas. « Les téléphones portables ne sont éventuellement laissés aux retenus que s’ils n’intègrent pas de fonction ''photographie'', ce qui est désormais rare », a reconnu le Conseil d’Etat dans un rapport sur la gestion des CRA datant de 2009.

Libérés, délivrés

Selon Le Figaro, deux avocats avaient signalé ce problème d’accès aux téléphones après avoir visité le CRA de Lille-Lesquin en décembre dernier. L’administration avait alors reconnu que plusieurs appareils avaient été vandalisés par les personnes retenues et qu’il ne restait qu’un téléphone en état de marche. Le compte n’y étant plus, le juge des libertés a donc décidé, samedi, de libérer les sept clandestins, estimant que leurs libertés fondamentales étaient bafouées.

De son côté, le préfet a fait appel de cette décision, assurant au JLD que depuis la visite des avocats, en décembre, la plupart des téléphones avaient été réparés. La préfecture a précisé que des téléphones portables étaient par ailleurs tenus à la disposition des personnes retenues dans un secteur du CRA dépourvu de cabine téléphonique en bon état de fonctionnement. Arguments irrecevables selon le JLD, lequel a estimé que la préfecture ne pouvait auto-attester des réparations qu’elle déclarait.