FraternitéL’Abbé Pierre, figure singulière de la culture populaire

70 ans après son appel, l’Abbé Pierre reste une icône singulière de la culture populaire

FraternitéL’Abbé Pierre, ou simplement l’Abbé, a profondément marqué la culture populaire française de par sa personnalité singulière, mais surtout par les valeurs qu’il véhiculait
Il y a soixante-dix ans, lors de l'hiver 1954, l'Abbé Pierre prononçait son appel au micro de Radio-Luxembourg (ex-RTL).
Il y a soixante-dix ans, lors de l'hiver 1954, l'Abbé Pierre prononçait son appel au micro de Radio-Luxembourg (ex-RTL). - Mehdi Fedouach / AFP
Maëva Fassino

Maëva Fassino

L'essentiel

  • Les paroles de son appel pour les sans-abri et les personnes victimes de mal-logement, diffusé il y a soixante-dix ans jour pour jour, résonnent encore aujourd’hui. Ayant marqué plusieurs générations de citoyens, d’artistes et de militants, l’Abbé Pierre – de son vrai nom Henri Grouès – était un personnage atypique.
  • L’homme barbu à la canne et à la soutane a longtemps été classé en tête des personnalités préférées des Français. A l’origine de nombreux mouvement associatif comme le mouvement Emmaüs, qui s’est développé à l’internationale, et la Fondation Abbé-Pierre, il a su faire perdurer ses combats jusqu’après sa mort, en 2007.
  • Dix-sept ans après sa disparition, le personnage et l’image de ce que représentait l’Abbé Pierre restent ancrés dans la culture populaire.

Résistant pendant la Seconde Guerre mondiale, prêtre catholique, théologien, homme politique : voici quelques-unes des casquettes qu’a portées Henri Grouès, dit L’Abbé Pierre, durant sa vie. Mais il est évidemment surtout connu pour ses engagements en faveur des sans-abri et du mal logement en France, notamment grâce à son « appel » diffusé il y a soixante-dix ans jour pour jour sur Radio-Luxembourg (ex-RTL).

« Mes amis, au secours… Une femme vient de mourir gelée, cette nuit à 3 heures, sur le trottoir du boulevard Sébastopol, serrant sur elle le papier par lequel, avant-hier, on l’avait expulsée… », commençait ainsi sa missive. En ce jour anniversaire, 20 Minutes revient sur l’héritage laissé par « Castor méditatif » (son totem chez les scouts).

Une allure pour une icône

Celui qui incarnait, selon le philosophe Roland Barthes, la figure « d’apostolat »*, a profondément marqué les générations successives. A tel point qu’il a été classé pendant une dizaine d’années en tête des personnalités préférées des Français, via le Journal du Dimanche). Récemment même, en 2021, un sondage de ToLuna pour TF1 révélait que l’Abbé était considéré comme la personnalité française la plus marquante des quarante dernières années. Et ce devant Coluche, Simone Veil ou encore Johnny.

Un sillon creusé notamment par son image. « Quand on pensait à l’Abbé Pierre, on visualisait presque systématiquement un vieil homme barbu en soutane, avec une canne de pèlerin et un béret, explique Yves Colin, directeur de la communication pour la Fondation Abbé-Pierre. Tous ces attributs physiques, en plus de ses combats bien sûr, ont participé à l’iconiphication du personnage ».

Une forte présence dans le milieu artistique

L’Abbé Pierre, c’était aussi une forte présence médiatique. Logique, donc, que les principaux acteurs de son « iconiphication » soient des artistes. Au cinéma, sa vie a récemment été racontée dans le biopic de Frédéric Tellier L’Abbé Pierre – Une vie de combats, fin 2023. « Ce n’est pas le mythe que nous avons voulu perpétuer, nous disait alors son interprète, Benjamin Lavernhe, mais l’histoire d’un homme exceptionnel, capable d’erreurs, de douleurs et de faiblesse ». L’histoire de l’appel du 1er février était aussi au coeur d’Hiver 54, réalisé en 1989 par Denis Amar, avec Lambert Wilson.

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Son image a également inspiré de nombreux graffeurs et artistes peintres, comme Repy One. « L’Abbé Pierre, c’était un personnage influent qui a marqué son temps, nous confie celui qui avait réalisé en 2019 un graffiti de l’homme d’Église. Il prônait des valeurs fortes qui me parlent. […] C’est quelqu’un de très représenté dans le monde du graff ».

L’industrie musicale, et surtout le rap, ne sont pas en reste. Le rappeur, comédien et producteur Fianso, parrain de la Fondation Abbé-Pierre, a notamment repris en 2022 le discours de l’appel sur France Inter dans l’émission Carte Blanche. L’artiste rap Nekfeu avait lui inséré un extrait du discours de l’Abbé dans son morceau « Nique les clones, part II. » en 2015. Un son qui a connu un grand succès bien que le public n’associe pas toujours le texte à son auteur original.

La persistance de ses combats

Et c’est là l’une des particularités de l’Abbé Pierre. Plus qu’une image, l’homme a légué à l’imaginaire collectif des combats à mener. « Il a laissé un grand nombre d’organisations, en plus de la Fondation, pour poursuivre. C’était une volonté de sa part », explique Yves Colin.

« Dix-sept ans après sa disparition, une grande partie de la jeune génération ne l’a pas ou peu connu. Mais les valeurs de fraternité, de vivre ensemble et de non-violence résonnent encore. Sa proposition d’une société avec un fonctionnement alternatif parle à beaucoup, particulièrement aux jeunes ».

* Dans un contexte religieux, Roland Barthes sous-entend que l’Abbé Pierre incarne une figure d’un homme envoyé par Dieu pour accomplir une mission spécifique sur Terre.

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