Sécurité sanitaireMorbier et E. coli… Comment remonter la source et éviter des intoxications

Morbier contaminé à l’E. coli : Comment remonter la source des contaminations et procéder aux rappels alimentaires ?

Sécurité sanitaireLes rappels de produits alimentaires sont nombreux, mais traduisent aussi une meilleure visibilité des alertes lancées
Ces dernières semaines, plusieurs cas d'enfants hospitalisés après avoir mangé du morbier contaminé par la bactérie E.coli ont été recencés.
Ces dernières semaines, plusieurs cas d'enfants hospitalisés après avoir mangé du morbier contaminé par la bactérie E.coli ont été recencés. - ALAIN JOCARD / AFP / AFP
Anissa Boumediene

Anissa Boumediene

L'essentiel

  • Ces dernières semaines, plusieurs cas d’enfants hospitalisés après avoir mangé des fromages contaminés par la bactérie E. coli ont été recensés. Parmi eux, celui d’une fillette de 7 ans, toujours hospitalisée à ce jour.
  • Les fromages incriminés avaient fait l’objet de rappels alimentaires.
  • Comment sont effectués ces rappels ? Et comment remonter à la source des contaminations ? « 20 Minutes » vous explique.

Morbier contaminé par la bactérie E. coli, poulet fermier contaminé à la listeria, riz thaï complet dépassant les limites autorisées de pesticides. Chaque jour, le site gouvernemental Rappel Conso recense les rappels et retraits de produits alimentaires impropres à la consommation, contaminés par une bactérie, la présence de corps étrangers tels que morceaux de plastique ou de métal, ou encore de substances chimiques.

L’un des derniers en date : le retrait des rayons des magasins Intermarché des bouteilles d’eau de source Fiée des Lois, en raison d’un problème de non-conformité de la qualité des eaux. Faut-il s’inquiéter de la fréquence de ces retraits et rappels alimentaires ? Comment sont-ils décrétés et peut-on améliorer la surveillance des produits ? 20 Minutes vous explique.

Des retraits et des rappels

« Certains produits de consommation courante peuvent présenter des risques pour la santé ou la sécurité des personnes, en raison d’un défaut de conception ou de fabrication, ou de la défaillance de certaines pièces, rappelle le ministère de l’Economie. Lorsqu’un risque est détecté après la mise sur le marché, le produit doit être retiré de la vente, ou rappelé s’il a déjà été vendu ».

Ainsi, des mesures administratives de retraits de produits peuvent être prises à la suite de contrôles réalisés par les agents de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) ou encore après le signalement d’un accident.

De leur côté, « les entreprises pratiquent régulièrement le rappel de produit, afin de récupérer des produits défectueux déjà vendus, ajoute le ministère. Elles procèdent essentiellement par voie de presse, à l’aide de campagnes relayées notamment par les associations de consommateurs. En outre, depuis le 1er avril 2021, les professionnels ont l’obligation de déclarer leurs rappels de produits sur le site officiel Rappel Conso », qui informe les consommateurs sur les rappels de produits.

Remonter à la source des contaminations

Ces dernières semaines dans la région lyonnaise, deux fillettes, sans lien de parenté, ont été hospitalisées après avoir mangé fin décembre du morbier contaminé par la bactérie E. coli : Elise, 7 ans, toujours hospitalisée, et qui pourrait perdre l’usage de ses reins. Et Clara, 18 mois, qui, selon ses parents, pourrait garder des séquelles neurologiques de cette contamination. Les deux petites filles ont consommé des fromages fabriqués par la société Route des Terroirs faisant l’objet d’un retrait, qui faisait suite à des investigations menées autour de cas groupés de syndrome hémolytique et urémique (SHU) pédiatriques. Quelques semaines plus tôt, des contaminations similaires avaient ainsi été observées, poussant les autorités sanitaires à déclencher des investigations. En novembre 2023, « 6 cas de SHU dus à la bactérie E. coli producteur de shigatoxine (STEC) ont été identifiés dans une crèche de Toulouse », rappelle le ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire.

Des contaminations aux conséquences heureusement bénignes pour ces six enfants touchés, mais qui ont poussé les autorités sanitaires à remonter à la source de ces intoxications. « Santé publique France en lien avec le centre national de référence des Escherichia coli (Institut Pasteur et Hôpital Robert Debré de Paris) et la Direction générale de l’Alimentation, en coordination avec la Direction générale de la Santé, ont immédiatement lancé les investigations sur les cas de SHU afin d’identifier une éventuelle source de contamination commune et mettre en place les mesures de gestion appropriées », détaille le ministère. Des investigations qui ont conduit « à identifier des éléments épidémiologiques, microbiologiques et de traçabilité convergents, faisant le lien entre au moins une partie de ces cas de SHU et des fromages Morbier produits par la société Route des Terroirs ». Et qui ont mené à une procédure de suspension de l’agrément sanitaire de la société.

« Si la plupart des souches d’E. coli sont sans danger pour la santé, certaines souches comme les E. coli entérohémorragiques (ou EHEC ou STEC) sont pathogènes car elles produisent une toxine (la shigatoxine) », rappelle l’Anses. Des souches « responsables de troubles variés, allant d’une diarrhée bénigne à des formes plus graves, comme des diarrhées hémorragiques et des atteintes rénales sévères, qui touchent principalement les jeunes enfants ». Ces souches « se transmettent principalement par l’alimentation, poursuit l’agence sanitaire. En France, les aliments le plus souvent mis en cause lors d’épidémies d’infections à EHEC sont les steaks hachés, consommés crus ou insuffisamment cuits, et les fromages au lait cru. La consommation de pâte à pizza crue ou insuffisamment cuite a également été à l’origine d’une épidémie en 2022 ».

Une meilleure visibilité

Si la longue liste des produits alimentaires rappelés peut faire peur, elle traduit surtout une meilleure communication autour de ces retraits et rappels alimentaires, notamment depuis le lancement par le gouvernement en 2021 du site Rappel Conso, qui les recense de manière exhaustive. « La qualité des contrôles en France est élevée, indiquait Stéphanie Chevalier-Lopez, meilleur ouvrier de France 2019 dans la classe conseil et expertise en sécurité alimentaire en restauration et fondatrice de SCL Qualité. Le risque zéro n’existe pas, mais le taux d’intoxication alimentaire est stable. Il n’y a pas davantage de rappels, mais le lancement de la plateforme publique Rappel Conso a permis d’améliorer leur visibilité ».

Pour améliorer encore la sécurité sanitaire des aliments, l’Anses prône pour davantage de contrôles des produits susceptibles d’être contaminés par la bactérie E. coli. « L’analyse des épidémies récentes en France et à l’étranger identifie de nouvelles sources de contamination autres que les steaks hachés de bœuf et les fromages au lait cru, dont les farines utilisées dans la pâte à pizza industrielle, rappelle-t-elle. Aussi, l’Anses recommande que d’autres filières alimentaires animales ou végétales puissent faire l’objet d’une surveillance microbiologique incluant des contrôles officiels et des autocontrôles ». Chaque année en France, environ 140 cas de SHU infantiles sont recensés.