GrossophobieCes « complimerdes » que les gros et les grosses ne veulent plus entendre

Ces « complimerdes » que les gros et les grosses ne veulent plus entendre

GrossophobieOk, c’est la Journée de la lutte contre l’obésité mais est-ce qu’on ne devrait pas combattre avant tout les préjugés et les remarques de merde ?
« T'as maigri, c'est cool »... ou le complimerde qui nous fait fondre un plomb.
« T'as maigri, c'est cool »... ou le complimerde qui nous fait fondre un plomb. - 20 Minutes / Montage 20 Minutes/Canva
Marion Pignot

Marion Pignot

L'essentiel

  • L’obésité touche désormais plus d’un milliard de personnes dans le monde, enfants et adolescents compris, selon une estimation publiée la veille de ce 4 mars, Journée mondiale de lutte contre l’obésité.
  • Si les experts parlent « d’épidémie », de « fléau », est-ce qu’on ne devrait pas combattre avant tout la déferlante de préjugés et de remarques de merde qui accompagnent les personnes en surpoids ?
  • Parce que l’enjeu majeur de santé publique que constitue l’obésité s’accompagne d’un problème de discrimination, 20 Minutes revient sur ces « complimerdes ». Selon l’expression empruntée à l’influenceuse Métaux Lourds, ce sont ces « phrases qui ressemblent vaguement à du sucre mais qui, quand même, puent sacrément la merde ».

Les « complimerdes », vous connaissez ? Ce sont ces soi-disant compliments qui cachent en réalité une critique un brin cruelle, de celle qui blesse. « C’est la phrase qui ressemble vaguement à du sucre mais qui, quand même, pue sacrément la merde », avançait la créatrice de contenus Métaux Lourds sur Instagram en mai 2020. Le post avait fait mouche et d’emblée le hashtag #complimerde se répandait sur les réseaux sociaux pour dénoncer le poids des mots.

Emilie*, l’amie de l’autrice de ces lignes, a fait de ce hashtag, le sien, le nôtre. Parce que la trentenaire qui nous définit comme « grosses et canons » en avait « ras le gras de l’opinion des gens, ceux dont on se fout de l’avis ».

« Si l’on n’est pas assez proche de la personne à qui l’on parle et qu’on ne peut l’exprimer sans un ''mais'', les commentaires sur le physique, qu’il s’agisse de compliments, de complimerdes ou autre, sont à éviter. » On dit « merci » à la rédactrice, autrice et traductrice québécoise Gabrielle Lisa Collard et on liste les « complimerdes » les plus répandus.

  • « Tu as un beau visage »

« Parfois, la grossophobie, elle est rampante. Elle est cachée derrière une petite blague, une réflexion. Parfois même derrière un compliment », rappelle Métaux Lourds. Et ce « complimerde-là, c’est le pire. Les gens ne s’en rendent pas compte, mais ça veut bien dire que le reste, tout le reste de ton corps est moche », explique Emilie. On rejoint la jeune femme et on le signale à nos meilleur.es potes qui veulent être sympas mais qui souvent nous renvoient en pleine face [qu’on a donc jolie] qu’on ne « correspond pas à la norme du beau ». On nous valide, certes, « mais partiellement », conclut pour sa part Métaux Lourds.

  • « T’es pas grosse, t’es belle »

« Ce compliment ne fait que témoigner de l’incapacité de la personne à considérer une personne grosse comme étant belle ou attirante », explique à 20 Minutes Gabrielle Lisa Collard.

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« Certes, tous les goûts sont dans la nature, mais la nature, c’est surtout une culture qui voue un véritable culte à la minceur et projette sur les corps plus en chair tous les maux du monde. Et ça ne fait pas plaisir à entendre », poursuit l’autrice. S’y cache aussi une notion de valeur, que le mot « grosse » a une connotation négative et donc, par exemple, qu’obésité ne peut pas rimer avec beauté.

  • « Toi c’est pas pareil, t’es grande donc ça se voit pas » ou « toi c’est pas pareil, tu sais te mettre en valeur »

« Comme si le trop devait être caché », analyse notre amie trentenaire et parisienne. Comme si une personne grosse devait nous faire oublier son poids. Et, comme si, « on devait absolument montrer qu’on fait l’effort d’être ou de paraître moins gros ou grosse, qu’on tente de correspondre à la norme. Cet effort-là fait de nous des personnes plus acceptées, validées par leur entourage », souligne le Gras Politique dans le podcast Matière Grasse.

  • « T’es grosse, mais t’es dynamique »

Je ne suis pas dynamique, je suis sportive. Merci. L’autrice de ces lignes vous dira : je fais du basket ou de la boxe, trois fois par semaine. Je vais à la salle de sport et je grimpe des cols tous les étés. Ce n’est pas du dynamisme, c’est faire du sport, comme tout le monde.

Comme le souligne Gabrielle Lisa Collard à 20 Minutes, ce lundi, « le poids n’est pas un indicateur fiable de l’état de santé global » d’une personne et « nombre de personnes grosses s’alimentent bien et bougent régulièrement ».

  • « Tu serais si jolie si tu perdais du poids »

« À force de se faire dire que notre corps est dégoûtant, inacceptable, incorrect, dangereux, rebutant, on finit par le croire », résume Gabrielle Lisa Collard. Et les autres aussi. Encore une fois, ce « complimerde » montre à quel point le gros ne peut être associé au beau, que le fait d’être en surpoids, c’est laid. « Ça me blesse parce que je n’entends que ''prends soin de toi'' ou ''fais un effort''. Comme si je me négligeais », explique l’amie Emilie. Surtout, ce « complimerde » est un jugement qui ne prend pas en compte l’envie ou l’avis de la personne à qui il s’adresse.

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  • « T’es tellement courageuse, tu t’assumes »

Comme l’explique Métaux Lourds, cette remarque induit que ne pas correspondre à la norme doit être « difficile à vivre ». Que sortir de chez soi « quand on est gros, c’est aussi compliqué que de tenter de combattre un lion à mains nues », ajoute Emilie. Et la trentenaire parisienne d’ajouter : « En fait, il faudrait qu’on vive caché. » Ce « complimerde » implique que, si on est gros, « on ne peut décidément pas être à l’aise avec son corps ». « Ces discours, c’est des petites graines qu’on fout dans notre cerveau très tôt et ils montrent que si on est ou que l’on devient gros, il faut tout faire pour ne plus l’être […] et que le fait de s’assumer serait donc une erreur et à nous d’en accepter les conséquences », explique Lisa, derrière MonGrosPodcast. Quelles conséquences ? La maladie, la honte, l’isolement, la laideur… voire la mort.

  • « T’as vachement maigri, c’est super »

« Ça peut sembler simple, mais je crois qu’il est bon de le répéter : les autres humains n’existent pas qu’en relation avec notre regard (ou notre pénis). Ils n’existent pas POUR nous, et notre opinion non sollicitée sur leur apparence ou le fait qu’ils nous attirent ou non n’a aucune pertinence », lâche Gabrielle Lisa Collard lorsque 20 Minutes lui parle de ces « complimerdes ». Et cette remarque est lâchée telle une bombe à une personne qui a peut-être maigri tout simplement parce qu’elle ne va pas bien (tout comme on grossit parfois parce qu’on ne va pas bien) ou parce qu’elle est sérieusement malade.

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A Emilie le mot de la fin : « En y réfléchissant, je crois que la reine des ''complimerdes'', c’est ma mère. Depuis toute jeune, il n’y a pas un matin où elle ne m’a pas fait un commentaire sur mes fringues. Et souvent c’était ''c’est bien, on voit moins ce que tu as en trop''. Une phrase dite avec le sourire et un câlin mais d’une violence inouïe. »

* Le prénom a été changé