PROCESAux Etats-Unis, un père jugé pour la fusillade perpétrée par son fils

Aux Etats-Unis, un père jugé pour la fusillade perpétrée par son fils dans son lycée

PROCESJames Crumbley, dont le fils, Ethan, a tué quatre élèves dans son lycée, est accusé d’avoir ignoré les signes avant-coureurs de son passage à l’acte. Sa femme a déjà été reconnue coupable des mêmes faits
James Crumbley sera jugé ce mardi pour « homicide involontaire ». Son fils a perpétré une fusillade dans son lycée avec l'arme qu'il lui avait offert.
James Crumbley sera jugé ce mardi pour « homicide involontaire ». Son fils a perpétré une fusillade dans son lycée avec l'arme qu'il lui avait offert.  - Clarence Tabb Jr./AP/SIPA / /AP/SIPA
Caroline Politi

C.Po.

L'essentiel

  • Ethan Crumbley a ouvert le feu dans son lycée du Michigan en novembre 2021, tuant quatre élèves et en blessant sept autres avec une arme que ses parents lui avaient offerte.
  • James Crumbley, son père, est jugé pour « homicide involontaire » à partir de ce mardi. Il lui est reproché d’avoir manqué à son « devoir de vigilance élémentaire ».
  • Sa femme, Jennifer, a déjà été condamnée pour les mêmes faits, une première.

James Crumbley. Si ce nom ne vous dit probablement pas grand-chose, il est associé, outre-Atlantique, à une affaire devenue emblématique des fusillades de masse. Cet Américain de 47 ans, dont le fils a ouvert le feu dans son lycée, sera jugé à partir de ce mardi pour « homicide involontaire ». La justice lui reproche d’avoir manqué à « son devoir de vigilance élémentaire ». En clair : d’avoir ignoré les signes pouvant présager de la tuerie dont son fils s’est rendu coupable. Sa femme, Jennifer, jugée séparément pour les mêmes faits, a déjà été condamnée – une première aux Etats-Unis – et sera fixée sur sa peine en avril.

Pour comprendre ce que la justice leur reproche, il faut remonter le temps. Le 30 novembre 2021, Ethan, alors âgé de 15 ans, a ouvert le feu dans son lycée du Michigan, tuant quatre élèves et en blessant sept autres. L’arme du crime, un Sig Sauer calibre 9 mm, lui avait été offerte par ses parents quatre jours auparavant. Un « cadeau de Noël en avance », ont-ils expliqué. Et ce, en dépit de multiples messages d’alerte sur la santé mentale de leur fils.

Au cours de leurs investigations, les enquêteurs ont, par exemple, exhumé plusieurs messages de l’adolescent à ses parents dans lesquels il leur fait clairement part de ses hallucinations. En mars 2021, il leur écrit que leur maison est hantée, qu’il y a vu des fantômes. James et Jennifer Crumbley ne lui répondent pas : l’analyse de leur téléphonie a mis en lumière qu’à ce moment-là, ils faisaient des selfies avec des chevaux. Quelques jours plus tard, l’adolescent écrit à sa mère avoir vu des objets « planer » dans la maison. Mais celle-ci ne prête pas attention à ce message.

Plusieurs alertes du lycée

Mais ce sont surtout les alertes du lycée, ignorées par les parents, qui ont poussé la procureure à engager des poursuites à leur encontre. Le 29 novembre, un professeur de l’établissement surprend Ethan en train de chercher à acheter des munitions sur Internet. L’administration appelle la mère de l’adolescent. Pas de réponse. Elle lui écrit un mail. Pas plus de réponse. Du moins pas à l’établissement. « Sérieusement, rechercher des munitions à l’école ?? », écrit-elle au même moment à son fils, selon le récit de Fox 2 qui a suivi l’audience. Quelques messages plus tard, Jennifer Crumbley tient à rassurer son fils : « Lol, je ne suis pas fâchée. Mais au moins tu as appris qu’il ne fallait pas te faire prendre. »

Le lendemain matin, un autre enseignant signale un dessin réalisé par Ethan : une arme à feu, une balle et une personne en sang. A côté, il a écrit « du sang partout », « ma vie est inutile » et « les pensées ne s’arrêtent pas. Aidez-moi. » Les parents sont immédiatement convoqués par l’administration. A 10h41 précise, les Crumbley arrivent au lycée.

Cette fois, la direction est formelle, Ethan doit être retiré de l’école et suivre une thérapie. Le rendez-vous dure onze minutes. A aucun moment, les parents n’ont précisé que leur fils avait reçu en cadeau une arme quatre jours auparavant. Ni que sa mère l’avait emmené sur le stand de tir le lendemain. Ils n’ont pas non plus parlé des hallucinations confiées par Ethan. Un peu plus d’une heure après ce rendez-vous, il ouvrira le feu dans l’établissement. En décembre 2023, l’adolescent a été jugé comme un adulte et condamné à la prison à perpétuité sans possibilité de libération anticipée.

Perception des parents

La condamnation de Jennifer Crumbley est-elle de mauvais augure pour son mari ? Assurément, même si un jury différent peut avoir une autre analyse du dossier. Reste que quel que soit le verdict, cette affaire illustre un changement dans la perception du rôle des parents dans ces fusillades.

En décembre, la mère d’un élève de 6 ans qui avait grièvement blessé par balle sa professeure d’école a été condamnée à deux ans de prison pour négligence parentale en Virginie. En novembre, c’est le père d’un homme accusé tué sept personnes près de Chicago lors de la fête nationale qui a plaidé coupable pour « comportement irresponsable » pour l’avoir aidé à acheter l’arme.