« BIEN MOURIR »« Laissez-moi mourir tranquille »… La poignante tribune de Charles Biétry

Fin de vie : « Laissez-moi mourir tranquille »… La poignante tribune de Biétry, atteint de la maladie de Charcot

« BIEN MOURIR »Atteint de la maladie de Charcot, Charles Biétry salue le projet de loi sur l'« aide à mourir » annoncé par le président de la République en fin de semaine dernière
Charles Biétry, à la Halle Carpentier, à Paris, le 2 décembre 2010, lors du combat entre Jean-Marc Mormeck et Timur Ibragimov.
Charles Biétry, à la Halle Carpentier, à Paris, le 2 décembre 2010, lors du combat entre Jean-Marc Mormeck et Timur Ibragimov. - REAU ALEXIS / SIPA
Aymeric Le Gall

Aymeric Le Gall

Difficile, voire impossible, de ne pas être pris dans un tourbillon d’émotion en lisant la tribune que Charles Biétry, l’ancien patron des sports de Canal+ et de France Télévisions, a envoyée à nos confrères de L’Equipe, pour saluer le projet de loi sur « l’aide à mourir » lancé récemment par Emmanuel Macron.

Atteint de la maladie de Charcot, ne pouvant plus marcher ni parler, cet amoureux du sport a tenu à raconter comment il en était venu à préparer son « suicide assisté » en Suisse, faute d’avoir droit de choisir de s’en aller en France quand il le souhaiterait.

« Lorsque ma réflexion m’a conduit à penser que la fin de ma vie serait un cauchemar, lorsque j’ai compris que quatre étapes m’attendaient, ne plus marcher, ne plus parler, ne plus avaler et enfin ne plus respirer, lorsque j’ai su que d’atroces souffrances m’attendaient, lorsqu’il m’est devenu évident que les miens souffriraient tout autant de me voir dans un lit, inerte, sans échange possible, guettant, longtemps peut-être, un dernier souffle, alors la famille s’est réunie », écrit l’ancien président éphémère du PSG.

Il poursuit : « Non sans émotion, non sans quelques larmes, non sans quelques mains serrées, nous avons décidé que nous ne laisserions pas la mort décider pour nous. Et s’il fallait aller en Suisse, nous irions. Les papiers sont prêts, la réservation est faite et les formalités sont remplies. Avec ma femme et mes deux enfants, nous partirons ensemble pour mettre un terme à ma merveilleuse vie. Je n’ai toujours pas peur de mourir mais j’ai peur d’avoir peur durant ce voyage qui sera difficile. »

« Un petit pas pour l’humanité mais un grand pas pour la dignité »

Un dernier voyage loin de sa Bretagne natale qui ne sera finalement peut-être pas nécessaire si le processus législatif est mené à son terme dans les mois à venir. « J’ai reçu comme un cadeau du ciel le projet d’aide à mourir du Président de la République, explique Biétry. Plus besoin d’aller en Suisse, plus besoin de se cacher dans le cabinet d’un médecin qui transgresserait la loi, plus besoin de se battre pour qu’on respecte ma liberté. »

« Parce que qui peut s’arroger le droit de choisir ma mort ? Je respecte la position de ceux qui, en bonne santé pour l’immense majorité, ne pensent pas comme moi mais je leur dis 'laissez-moi mourir tranquille'. Je leur dis aussi 'laissez-moi continuer à combattre la maladie', conclut-il dans ce vibrant message. Et je dis à tous mes copains malades 'accrochez-vous, les recherches avancent. Quelques-uns d’entre nous seront peut-être sauvés.' Pas moi sans doute mais au moins j’aurais vu une première avancée, encore insuffisante, dont je pourrai profiter. Et qui me permet de conclure que c’est un petit pas pour l’humanité mais un grand pas pour la dignité. »