BARONSLes députés « philippistes » veulent (en partie) recumuler les mandats

Cumul des mandats : Pourquoi les députés « philippistes » veulent revenir (en partie) comme avant

BARONSLes députés Horizon proposent, dans leur niche parlementaire ce jeudi, de desserrer l’étau strict de la loi sur le cumul des mandats… sans beaucoup de chances de succès
Le président du groupe Horizon à l'Assemblée nationale, Laurent Marcangeli. (archives)
Le président du groupe Horizon à l'Assemblée nationale, Laurent Marcangeli. (archives) - LUDOVIC MARIN  / AFP
Rachel Garrat-Valcarcel

Rachel Garrat-Valcarcel

L'essentiel

  • A l’occasion de leur niche parlementaire ce jeudi, les députés Horizon proposent « d’aménager » la fin du cumul des mandats.
  • Selon eux, la loi de 2014 a aggravé la distance entre la population et les élus et élues.
  • Seules la droite et l’extrême droite semblent les suivre sur cette idée.

Dix ans, ça se fête. La loi réduisant strictement le cumul des mandats des députés, députées, sénateurs et sénatrices a été votée en 2014. Depuis, un parlementaire peut avoir un mandat local, mais pas un pouvoir exécutif local (maire, président de collectivité, adjoint au maire ou vice-président). Mais chez Horizon, le parti d’Edouard Philippe, associé au camp macroniste à l’Assemblée nationale, on n’est pas trop dans l’ambiance. Henri Alfandari, député d’Indre-et-Loire, va même proposer lors de la niche parlementaire de son groupe, ce jeudi, qu’on revienne en partie sur cette loi.

« On ne revient pas, on aménage », précise-t-il. En clair, un parlementaire ne pourrait toujours pas être maire ou président de collectivité, mais adjoint ou vice-président, si. Car selon Henri Alfandari, s’il y a une fracture entre les élus et élues nationales et la population, c’est notamment à cause du cumul des mandats devenu impossible.

Charge en plus

Est-ce bien raisonnable de redonner cette charge aux élus et élues du Sénat et de l’Assemblée, dont les emplois du temps sont déjà bien remplis ? « Vous dites charge comme si ça n’était pas une continuité de notre travail ! Quand on est dans un exécutif local confronté aux règles qu’on a voté, lorsqu’on revient au national et qu’on rédige les lois, on se pose d’autres questions », poursuit l’élu.

Les députés ont beau passer du temps dans leur circonscription d’élection, être à « l’écoute » de leur territoire, pour Henri Alfandari, rien ne remplace « l’opérationnel ». Quitte à être moins opérationnel à l’Assemblée ou au Sénat ? « Avant 2014, il y avait des abus, des gens qui allaient trop loin. C’est pour cela que notre option n’est pas de revenir sur la loi de 2014. » Le retour au Parlement d’élus dans des exécutifs locaux doit permettre d’améliorer leur « diversité »… alors qu’ils sont déjà 50 % à être simples élus locaux.

La gauche toute contre

Les arguments du rapporteur Alfandari ont peu convaincu jusque-là. En commission, la gauche s’est opposée à ce qu’elle estime être une « régression » vis-à-vis d’une réforme votée durant le quinquennat Hollande. Les écologistes pensent que la proposition de loi va « à l’opposé de ce qu’il faut faire ». Ainsi, si la question de la reconnexion des élus avec les citoyens leur parle, Jérémie Iordanoff dit que c’est en redonnant aux parlementaires « la mission qui est la leur » qu’on y arrivera. Il a dans le viseur les nombreux 49.3 utilisés sur le vote du budget, qui « privent le Parlement de sa raison d’être ».

La socialiste Cécile Untermaier, pour qui « le cumul est une plaie », veut bien travailler sur le rôle local des députés et députées, mais certainement pas comme ça. Quant aux insoumis, ils contestent l’idée que les députés doivent avoir un rôle local et jugent que de toute façon, pour changer véritablement la donne entre élus et citoyens, c’est toute la Constitution qu’il faut changer.

Droite et extrême droite en alliés

Et de l’autre côté de l’échiquier ? « L’augmentation constante de l’abstention montre que rien n’a été résolu alors que les parlementaires hors sol se sont multipliés », attaque le RN Bruno Bilde, qui voit d’un bon œil cette proposition de loi. Lui critique d’ailleurs plus les cumuls de mandats locaux, entre mairies, agglomérations et régions ou départements. Horizon trouvera aussi des alliés chez LR, où on juge « caricatural » les arguments de la gauche sur les « baronnies locales », . Avec certains élus Liot (divers gauche et divers droite), ce sont a priori les seuls alliés que les Philippistes ont trouvé.

Car dans le reste de la majorité, on est au minium frileux. Chez Renaissance, on s’en tient à une abstention. Ludovic Mendes préfère en effet une réforme globale du « statut de l’élu », arlésienne remise en lumière ces derniers jours par la ministre déléguée chargée des Collectivités territoriales, Dominique Faure. Au MoDem, si Élodie Jacquier-Laforge juge le débat « légitime », elle réfute toute déconnexion des élus. Sachant que c’est la plupart du temps aux élus de la majorité, souvent apparus de nulle part en 2017, que l’on fait ce reproche.

Henri Alfandari est convaincu qu’on ne peut pas calquer le résultat du vote en commission, qui a vu cette proposition de loi rejetée, avec ce qu’il se passera en séance jeudi. Chez Horizon, on assume de défendre une idée « pas populaire ». Ça se veut courageux, pas « politiquement correct »… Mais cela risque surtout de renforcer l’idée – savamment distillée par certains de leurs amis du camp gouvernemental – que le parti d’Edouard Philippe n’est qu’un club d’élus.