JEUX OlympiquesLa rumeur d’Aya Nakamura aux JO déchaîne un torrent de racisme

Avalanche de commentaires racistes, récupérations politiques… La rumeur d’Aya Nakamura aux JO enflamme le pays

JEUX OlympiquesDepuis qu’elle est pressentie pour chanter lors de la cérémonie d’ouverture des JO de Paris 2024, Aya Nakamura est la cible d’attaques racistes
Aya Nakamura lors de la Fashion Week à Paris le 26 septembre 2023.
Aya Nakamura lors de la Fashion Week à Paris le 26 septembre 2023.  - JM HAEDRICH/SIPA / SIPA
Clio Weickert

C.W. avec AFP

L'essentiel

  • Aya Nakamura serait pressentie pour chanter lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux Oympiques de Paris 2024.
  • Depuis la révélation de cette rumeur, l’artiste est la cible de l’extrême droite et est victime d’attaques racistes.
  • « Aya Nakamura chantant Piaf », banderole haineuse, soutiens politiques… « 20 Minutes » retrace ce cas d’école de l’expression du racisme décomplexé.

«Attention aux prétextes pour s’attaquer à quelqu’un par pur racisme. S’attaquer à une artiste pour ce qu’elle est est inacceptable, c’est un délit », a mis en garde Rachida Dati, mardi, lors d’une audition au Sénat. A l’origine de cette prise de parole de la ministre de la Culture ? Les attaques que subit Aya Nakamura depuis plusieurs semaines.

Depuis qu’elle est pressentie pour chanter lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Paris 2024, l’artiste est victime d’attaques haineuses. De nombreuses personnalités ont apporté leur soutien à la chanteuse. Banderole raciste, réactions politiques… « 20 Minutes » vous propose de remonter le fil des événements.

« Aya Nakamura chantant Piaf »

Tout est parti de L’Express le 29 février. Dans un article intitulé « Aya Nakamura chantant Piaf : les exigences secrètes d’Emmanuel Macron pour les JO 2024 », l’hebdo affirmait que la chanteuse aurait rencontré le président de la République il y a quelques semaines, afin de discuter de son éventuelle participation à la cérémonie d’ouverture. Et plus précisément de la possibilité d’y interpréter une chanson d’Édith Piaf, appréciée par l’artiste.

Une information qui n’a toujours pas été confirmée par Emmanuel Macron ou Aya Nakamura, mais qui n’aurait rien de surprenant. Artiste francophone la plus écoutée au monde, la chanteuse collectionne les récompenses : plusieurs disques de platine, d’or et de diamant, « artiste de l’année » aux Flammes l’an dernier, puis une statuette aux Victoires de la musique en 2024… Parmi les 20 albums les plus vendus en France en 2023, dévoilés mardi par le Syndicat national de l’édition phonographique (SNEP), Aya Nakamura est la seule femme à y figurer, rapporte le Huffington Post. Un succès indéniable, n’en déplaise à certains.

« Tu dead ça »

Dès le lendemain de la parution de l’article de L’Express, l’éventualité de la présence de l’artiste à la cérémonie d’ouverture des JO avait du mal à passer chez certains commentateurs.

La journaliste Eugénie Bastié, sur CNews, a présenté un extrait de Djadja (« J’suis pas ta catin, Djadja, genre, en catchana baby, tu dead ça »). « C’est le rayonnement de la langue française dans toute sa beauté, son classicisme, c’est merveilleux », a-t-elle commenté, non sans sarcasmes, sous les regards amusés des invités en plateau.

« Si on interdisait à la culture française de s’enrichir des autres ou de ceux qui s’amusent malicieusement avec la langue française, on n’aurait pas Renaud, Brassens, Baudelaire », a souligné de son côté Boris Vedel, directeur du Printemps de Bourges, auprès de l’AFP. Mais cette histoire ne se résume pas à une simple analyse de texte.

« Le caractère raciste des propos est assez évident »

Derrière ces commentaires, il y a la remise en question de la légitimité d’Aya Nakamura à représenter la France lors de cette cérémonie. « Cette femme ne chante pas en français, elle ne représente pas la langue française », s’est offusquée sur BFMTV Marion Maréchal, tête de liste aux élections européennes de Reconquête !, le parti d’extrême droite d’Éric Zemmour.

Des huées ont surgi à l’évocation de l’artiste dimanche, lors d’un premier grand meeting de campagne des élections européennes de ce même parti. En outre, un groupuscule de l’ultradroite, Les Natifs, a posté sur ses réseaux une photo d’une banderole tendue par une dizaine de ses membres sur les bords de Seine. « Y’a pas moyen Aya, ici c’est Paris, pas le marché de Bamako ! », peut-on y lire. « Y’a pas moyen » renvoie à son hit « Djadja », aux plus de 950 millions de vues sur YouTube.

Sur X, Aya Nakamura a réagi à cette attaque. « Vous pouvez être raciste mais pas sourd. C’est ça qui vous fait mal ! Je deviens un sujet d’état numéro 1 en débats etc., mais je vous dois quoi en vrai ? Que dalle ».

« J’y vois carrément une provocation à la discrimination, de manière cumulative, et même à la violence parce que sur la banderole il y a le message "il n’y a pas moyen". Donc tout va être fait pour empêcher Aya Nakamura de chanter, de travailler. Qu’est-ce que ça veut dire ? On indique au public qu’il faut absolument réagir, peut-être physiquement. Ça induit une rhétorique assez guerrière. Le caractère raciste des propos est assez évident », a dénoncé l’avocat de l’artiste sur RMC mercredi.

« La France (…) célébrera la beauté et la richesse de sa diversité »

Au-delà des propos de la ministre de la Culture, mardi, la ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra a estimé mercredi sur France Info que la chanteuse « a été victime d’attaques racistes qui sont tout à fait inadmissibles et qui doivent être condamnées avec la plus grande fermeté ».

Par ailleurs, la mégastar a récolté de nombreux soutiens, dont celui du metteur en scène Thomas Jolly, chargé de la cérémonie d’ouverture des JO, qui s’est dit sur ses réseaux « profondément choqué par le racisme dont est victime Aya Nakamura ».

Sans confirmer la participation de la chanteuse, il promet que « les cérémonies s’élèveront contre toute forme de discrimination. La France, à travers une mosaïque de talents, célébrera la beauté et la richesse de sa diversité. »

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