TendanceCe sac de supermarché peut-il vraiment se vendre 1.000 euros?

De 3 à 1.000 euros, c’est quoi ces sacs de supermarché qui se revendent à prix d’or sur Internet ?

TendanceLe mini sac de la chaîne américaine Trader Joe’s s’arrache et vaut une fortune désormais à cause de… TikTok
Le sac Trader Joe's s'arrache aux Etats-Unis
Le sac Trader Joe's s'arrache aux Etats-Unis - Getty Images Signature/Capture d'écran / Canva/Le Bon coin
Lina Fourneau

Lina Fourneau

L'essentiel

  • Trader Joe’s, la chaîne de supermarchés américaine, commercialise des sacs en toile à petit prix qui connaissent un engouement soudain et inexpliqué sur TikTok, entraînant des ruptures de stock et une flambée spéculative des prix à la revente.
  • Plusieurs explications peuvent expliquer ce phénomène éphémère proche d’une « bulle spéculative » : viralité des réseaux sociaux, effet communautaire, rareté du produit hors des États-Unis.
  • La marque, elle, désapprouve cette revente à prix fort.

Un sou est un sou. Surtout dans une période où, sous la pluie parisienne, on pense à renflouer les caisses pour se faire plaisir sur les plages de la Méditerranée cet été. Alors en voyant cet article du Washington Post qui raconte comment un sac fourre-tout du supermarché américain Trader Joe’s – l’équivalent de Monoprix aux Etats-Unis – se vend actuellement à plusieurs milliers de dollars, on se dit : « Et si c’était notre moment ? ». Par chance et sans trop d’explications, on se rappelle qu’on avait bien acheté ce même sac en toile lors de notre grand voyage à San Francisco, en 2017. Gros pigeon ou avant-gardiste des tendances, on vous laisse juger.

Mais d’abord, petite explication de cette nouvelle fougue, car à première vue, le produit n’avait pas de quoi rameuter les foules. 65 % de coton, 35 % de polyester, quatre coloris, un prix de 2,99 $ aux caisses. Rien de folichon. Mais comme pour de nombreuses tendances, TikTok a une nouvelle fois glissé une pièce dans la machine. Sur les vidéos virales, les consommateurs attendent plus ou moins patiemment le réassort en rayon. « Qu’est ce qu’il y a dans mon mini-sac Trader joe ? » est devenu une question routinière sur le réseau social. « Un joli carnet et un coca zéro », répondra une Tiktokeuse. « Ça me donne un peu air fermier du marché », décrit une autre. Avec cette hype en ligne, le sac s’arrache et est devenu, à l’image d’un sac Chanel ou d’un Birkin de Hermès, un « it bag ».

« C’est à vous de choisir si vous voulez investir »

Seulement, pour l’acquérir, les acheteurs doivent désormais exploser leur PEL. En ligne, le prix du sac en toile passe d’un modeste coût de trois dollars à une quinzaine d’euros. Sur Vinted, par exemple, les prix sont fixés entre 17,50 et 20 euros. Quand on demande aux vendeurs la raison de ces prix, plusieurs options s’offrent à nous. « Je suppose que c’est parce qu’on ne peut pas les obtenir en Europe », estime Akari, une vendeuse espagnole, qui nous rappelle que « c’est à nous de choisir si on veut investir ou non dans ces sacs ».

Pour Jade, vintie des Pays-Bas, le prix se justifie par l’expédition et les taxes. Mais elle ajoute : « Comme pour le tote bag Sézane, ils sont gratuits lorsque vous achetez quelque chose et ils sont vendus vingt euros ici ». Logique. Mais aussi surprenant que cela puisse paraître, en seulement trois jours, tous les stocks de mini-tote bag Trader Joe’s ont finalement été vendus.

Spéculation partout, justice nulle part

Même phénomène observé sur eBay, où les prix sont nettement gonflés. L’ensemble de quatre mini-tote bag peut dépasser le millier d’euros chez certains vendeurs. Mais les prix fluctuent. Coûtant 1.100 dollars le mardi, le lot affiche un prix de « seulement » 117 dollars en fin de semaine. Tant pis pour notre fortune. En quelques jours, le cours du sac s’est presque effondré ne laissant plus beaucoup d’espoir aux rêves de villa sur la Côte d’Azur dans laquelle nous comptions investir avec notre butin.

« C’est quasi spéculatif ces phénomènes », justifie Johanna Volpert, professeure en marketing à l’école de commerce Kedge, qui compare l’événement à la « crise » de la tulipe aux Pays-Bas en février 1637. C’est dans l’histoire, la première bulle spéculative où une nouvelle fougue pour la fleur a entraîné une hausse monumentale des prix… le bulbe se vendant parfois au prix d’une maison. Si pour la spécialiste, le phénomène n’est pas si commun, il ne s’arrête donc pas aux frontières américaines et peut également arriver chez nous. « Sur les sneakers ou les montres », par exemple.

« Je pense que c’est normal dans le sens où, aujourd’hui, il y a beaucoup de choses qui passent par l’influence et par la viralité, analyse la professeure en marketing. Beaucoup de choses passent par ce qui est communautaire. Au-delà des biens, il y a les liens qui créent des mouvements de consommateurs ».

La chaîne n’approuve pas les reventes

Contre toutes attentes, cette fougue ne ravit pas la marque qui avait bien remarqué que leurs mini-sacs fourre-tout s’étaient « vendus plus rapidement que prévu ». « Avant que nous ayons eu l’occasion de les promouvoir de quelque manière que ce soit, des clients de tout le pays les trouvaient chez Trader Joe’s de leur quartier », précise son service de presse auprès de 20 Minutes. Et le supermarché de signaler : « Nos clients, dans nos magasins, sont notre priorité ; nous n’approuvons la revente d’aucun de nos produits, où que ce soit ».

Après cette totebagmania, l’entreprise se désole d’une pénurie de son produit, mais ajoute que les sacs « devraient revenir à l’été ».