reversMacron défend le traité Ceta au lendemain de son rejet par le Sénat français

Ceta : Emmanuel Macron défend le traité au lendemain de son rejet par le Sénat français

reversLe Sénat s’est opposé jeudi à la ratification du traité Ceta de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada, une déconvenue embarrassante pour l’exécutif sur la route des élections européennes
ILLUSTATION / ARCHIVES : Strasbourg le 15 février 2017. Manifestation contre le Ceta devant le Parlement Européen à Strasbourg.
ILLUSTATION / ARCHIVES : Strasbourg le 15 février 2017. Manifestation contre le Ceta devant le Parlement Européen à Strasbourg. - G. Varela / 20 Minutes / 20 MINUTES
20 Minutes avec AFP

20 Minutes avec AFP

Le Ceta, traité de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada, est « un très bon accord » pour l’agriculture française, a déclaré ce vendredi le président Emmanuel Macron depuis Bruxelles, au lendemain du rejet par le Sénat français de la ratification de cet accord.

Citant les bénéfices de l’accord pour les secteurs français du « lait », « fromage » ou « vin », le chef de l’État a appelé à ne pas « mettre dans le même sac tous les accords commerciaux » de libre-échange. « C’est de la démagogie », a-t-il encore dénoncé, lors d’une conférence de presse à l’issue d’un Conseil européen.

« Les chiffres démontrent (le) succès considérable » du Ceta, a également commenté ce vendredi la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen lors d’une conférence de presse. Elle a dit prendre « acte » du scrutin sénatorial, et appelé à voir « comment la France allait composer » avec ce résultat.

« Nous continuerons de travailler à la ratification »

Une coalition de sénateurs de droite et de gauche, à l’initiative des élus communistes, a réussi jeudi à mettre au vote le projet de loi de ratification que le gouvernement français n’avait jusqu’ici jamais inscrit à l’agenda de la chambre haute. Le vote de rejet de l’accord commercial a donc logiquement été large, à 211 voix contre 44.

L’opération, conclue par le rejet du Ceta, est un revers pour le gouvernement français, en pleine crise agricole et à quelques mois des européennes. « Des gens qui aujourd’hui le combattent la main sur le cœur, sont ceux qui l’ont signé et tout le monde oublie qu’on l’a largement amélioré », a critiqué le chef de l’Etat.

Le traité avait été conclu au moment de la présidence du socialiste François Hollande (2012-2017). « Ceux qui pourraient prendre des résolutions contre le Ceta, ce serait des Canadiens avec nous », a encore affirmé le chef de l’Etat. Il a rappelé que le vote du Sénat « n’a pas de conséquences sur la mise en œuvre provisoire du Ceta », effective depuis 2017 à l’échelle européenne.

« Nous continuerons de travailler à la ratification (…) avec nos partenaires dans l’UE afin de faire progresser nos intérêts stratégiques communs », a pour sa part réagi jeudi le gouvernement canadien.

Jubilation chez les éleveurs, consternation chez les exportateurs de vin

« Il y a des bonnes nouvelles de temps en temps », a jubilé auprès de l’AFP le président de la Fédération nationale bovine (FNB), Patrick Bénézit, par ailleurs deuxième vice-président du syndicat agricole majoritaire FNSEA. Selon lui, les sénateurs ont « enfin eu l’occasion de faire le bon choix, celui de ne pas ratifier un traité qui autorise des denrées alimentaires qui ne respectent pas nos conditions de production ».

D’un bout à l’autre du spectre, les syndicats agricoles se sont réjouis jeudi. Le président des Jeunes agriculteurs Arnaud Gaillot « salue » le vote sur X (ex-Twitter) au motif que « le manque de garanties sur la réciprocité normative aurait menacé nos filières d’élevage ».

Registre opposé à la Fédération des exportateurs de vins et spiritueux (FEVS), secteur agroalimentaire qui a le plus bénéficié du Ceta. Le vote des sénateurs « va porter un mauvais coup à l’ensemble de la filière des vins et des spiritueux », a déclaré à l’AFP le délégué général de la Fédération des exportateurs de vins et spiritueux (FEVS), Nicolas Ozanam.

« Dans un moment économiquement compliqué [pour les exportations de la filière, N.D.L.R.], se mettre dans une position délicate après une bonne dynamique [depuis la mise en œuvre du traité] nous paraît totalement surréaliste », a-t-il regretté.

Et après ?

Ce rejet du Sénat ne suffit pas à lui seul à dénoncer l’accord à l’échelle européenne. Et une incertitude plane désormais sur la suite du parcours législatif du projet de loi contenant le traité Ceta.

Après leurs collègues sénateurs, les députés communistes ont annoncé leur intention de l’inscrire dans leur temps parlementaire réservé – leur « niche » prévue le 30 mai à l’Assemblée –, à dix jours des élections européennes. « Le vote d’aujourd’hui ne peut rester lettre morte », ont estimé les députés communistes dans un communiqué, jugeant que « la confirmation par l’Assemblée nationale du rejet du CETA permettra de mettre fin à son application ».

En 2019, les députés avaient approuvé de justesse la ratification du Ceta, mais le camp présidentiel a depuis perdu la majorité absolue au Palais Bourbon, ce qui laisse craindre un nouveau rejet…

Dans ce cas de figure, l’équation deviendrait alors très complexe : soit le gouvernement notifie à Bruxelles qu’il ne peut ratifier le traité et cela entraîne la fin de son application provisoire pour toute l’Europe ; soit il temporise au risque de s’attirer les foudres des oppositions qui crieront au déni démocratique.

Une autre hypothèse circule parmi les parlementaires : l’exécutif ayant la main pour transmettre un projet de loi d’une chambre à l’autre, il pourrait ne pas transmettre le texte à l’Assemblée nationale… ce qui empêcherait de facto qu’il soit inscrit à l’ordre du jour le 30 mai.