énigmeOn a percé le mystère des gens qui paient encore par chèque

On a percé le mystère des gens qui paient encore des trucs avec des chèques

énigmeQui se souvient du dernier chèque qu’il a signé ? Les moins de 30 ans savent-ils seulement ce qu’est un chéquier ? « 20 Minutes » a voulu savoir si ce moyen de paiement d’un autre temps était encore utilisé au XXIe siècle
Pourquoi tant de personnes continuent-elles à payer par chèque ?
Pourquoi tant de personnes continuent-elles à payer par chèque ? - JAUBERT/SIPA / Sipa
Mikaël Libert

Mikaël Libert

L'essentiel

  • Parce que le plus important, c’est vous, « 20 Minutes » mène l’enquête sur les mystères qui vous tombent dessus au quotidien.
  • Cette fois, nous nous attaquons au chèque bancaire, ce petit bout de papier qui vaut de l’or et dont l’usage se perd au profit de moyens de paiement plus modernes.
  • Si le nombre de transactions par chèque est en baisse constante, c’est un outil qui reste très utile pour différer des paiements, régler d’importants montants, voire suppléer une CB qui ne passe pas.

Aujourd’hui, la CB est reine. On paie aussi avec son smartphone, et bientôt avec la paume de sa main. Mais s’il semble dépassé, désuet, peu pratique, encombrant et souffrant d’une mauvaise réputation, le chèque bancaire n’est pas mort pour autant. Du moins pas encore. A l’instar d’Édouard Balladur découvrant le métro parisien, nous avons été stupéfaits d’apprendre que les utilisateurs de chèques bancaires étaient bien plus nombreux que nous l’imaginions.

Un a priori de « cons de citadins », balançait un lecteur en réponse à notre appel à témoins. Ce n’est pas très gentil, d’autant qu’on a quand même un peu raison : « Au premier semestre 2023, on est passé sous la barre des 3 % du nombre de transactions parmi les paiements scripturaux », confirme à 20 Minutes Clément Bourgeois, spécialiste des moyens de paiements scripturaux à la Banque de France. Quoi qu’il en soit, 20 Minutes a tenté de percer le mystère de ces gens qui paient encore des trucs par chèque.

« Le temps est suspendu »

Vous avez été trèèèèès nombreux à avoir répondu à cet appel à témoignages pour nous confier que ce petit bout de papier avait toujours une place dans votre porte-monnaie, entre votre carte bancaire et la photo des gamins, pas loin de l’iPhone avec Apple pay. Pour régler vos courses, comme Andréa. Payer le médecin, comme Marie-Thérèse, ou le véto, comme Camille. Déposer une caution, comme Francine. Rétribuer vos artisans, comme Nicole. Ou encore casquer le Noël des petits, comme Camélia.

Autant de choses que l’on peut faire avec une CB, nous direz-vous. Certes, mais s’ils dégainent le chéquier, c’est qu’ils ont une bonne raison. « J’utilise les chèques en priorité pour les gros montants et en relais de ma CB lorsque j’ai atteint le plafond », explique Nathalie. Pour Julien et beaucoup d’autres, le chèque à l’avantage de ne pas être débité immédiatement : « je profite du délai d’encaissement pour faire passer une dépense imprévue sur le mois prochain », reconnaît-il. « Le temps est suspendu avec ce paiement qui ne sera débité que dans quelques jours, une semaine, quelques mois… ou parfois jamais ! », espère Frédéric. Et il n’a pas tort, car si votre chéquier n’a pas de date de péremption, la personne bénéficiaire, elle, a « un an pour l’encaisser », insiste Clément Bourgeois. Après, il lui restera ses yeux pour pleurer.

Quand la CB est « non grata »

Ce qui revient souvent aussi comme argument parmi les gratteurs de chéquiers, ce sont les professions libérales, associations, établissements scolaires et artisans, peu ou pas équipés de TPE (de terminal de paiement, de machine à carte quoi) : médecin, infirmier, aide à domicile, plombier… Sans oublier les commerçants préférant les chèques ou les paiements en espèces pour éviter les frais. « Ce n’est pas le cas avec un chèque, aucun frais n’étant appliqué ni à l’émetteur, ni au bénéficiaire », précise le spécialiste de la Banque de France.

Sans oublier le récurrent « problème de connexion » dans les zones blanches, empêchant le fonctionnement d’un terminal de paiement. Et que dire des « montants minimums en CB » ou du « sans-contact » qui marche une fois sur deux ? Pour autant, notre spécialiste reconnaît que « rien n’oblige un commerçant à accepter un chèque, pourvu que ce soit clairement indiqué ».

Par crainte des pirates

Outre le côté contraint ou pratique, certains lecteurs mettent en avant la sécurité. Gilles et Juliette, par exemple, ne quittent plus leurs chéquiers depuis qu’ils ont été victimes de tentatives de fraude à la carte bancaire. A 76 ans, Michel à « la trouille d’utiliser la carte via Internet » pour régler ses achats « par correspondance ». Alors il envoie des chèques. Quitte a se faire voler son sac, Liliane préfère y laisser un chéquier, moins facile à utiliser qu’une carte bancaire, selon elle.

Grave erreur. S’il faut admettre que la carte bancaire n’est pas le moyen de paiement sécurisé ultime, « c’est le chèque qui a le taux de fraude le plus élevé », rappelle Clément Bourgeois. Chèques perdus, volés ou sans provision…

Le chèque va-t-il disparaître ?

« J’utilise les chéquiers car c’est moi qui les fabrique et j’ai pas envie de finir au chômage », conclut Raphaël. Sauf que son implication ne suffira sans doute pas : la chute des transactions par chèque est une « tendance de long terme », analyse le spécialiste de la Banque de France.

Néanmoins, son arrêt de mort n’est pas encore signé. La réglementation imposant toujours aux banques de vous proposer ce moyen de paiement. D’ailleurs, il est où, mon chéquier ?

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