Lycées« Un stage kebab n’apportera rien »… La galère des lycéens sur « 1 jeune 1 solution »

Stage obligatoire en seconde : La plateforme pour le trouver déçoit, des lycéens en grosse galère

LycéesNouveauté de cette année, les quelque 600.000 élèves de seconde devront tous réaliser un stage de deux semaines au mois de juin. Mis en ligne lundi, le site « 1 jeune 1 solution » censé aider les lycéens à en décrocher un déçoit
Les lycéens doivent trouver un stage en entreprise pendant la deuxième quinzaine de juin. (Illustration)
Les lycéens doivent trouver un stage en entreprise pendant la deuxième quinzaine de juin. (Illustration) - 1BSG / Canva
Julie Urbach

Julie Urbach

L'essentiel

  • La plateforme 1 jeune 1 solution a été mise en ligne lundi pour aider les lycéens de seconde à trouver leur stage désormais obligatoire au mois de juin.
  • Elle semble faire des déçus chez les élèves et leurs familles, en raison notamment d’un nombre d’offres trop faible. Conséquence, les annonces disponibles sont prises d’assaut.
  • Le syndicat majoritaire des chefs d’établissement SNPDEN-Unsa dénonce un sous-dimensionnement et un manque d’anticipation.

«Je cherche depuis le début de l’année dans le cinéma, mais je ne trouve rien. Sur le site non plus il n’y a rien, c’est un peu nul… » Comme pour Lisa, croisée devant un lycée nantais, c’est la galère chez une partie des quelque 600.000 élèves en seconde générale et technologique du pays.

Nouveauté de cette année, plutôt que de se la couler douce la deuxième quinzaine de juin, ces adolescents vont devoir effectuer un stage d’observation « en milieu professionnel » obligatoire, comme l’a voulu Gabriel Attal alors qu’il était ministre de l’Education. Et à moins de trois mois de l’échéance, la recherche s’avère compliquée, même si le gouvernement vient de mettre en ligne une plateforme 1 jeune 1 solution censée les aider.

Un nombre d’offres jugé trop faible

Ouvert depuis lundi, le site ne semble cependant pas très connu des lycéens et de leurs parents. Et quand il l’est, il récolte déjà son lot de critiques, notamment en raison d’un nombre d’annonces (qui pouvaient être déposées depuis trois semaines par les entreprises, collectivités ou associations) pour le moment décevant. « Pour un stage d’avocat, seules deux offres sont disponibles à Tarbes et à Nice. C’est l’impasse pour de nombreuses familles », dénonce ce mardi la FCPE.

« Quand je tape mon code postal il n’y a aucune offre disponible ! », s’étonne également un internaute, domicilié dans un département d’Outre-mer. « A Strasbourg, c’est quatre stages sur la plateforme… Tous dans la formation, deux dans une administration », regrette un autre, sur les réseaux sociaux.

« Sous-dimensionné et mal anticipé »

Quand on l’épluche un peu, c’est vrai que le site propose une bonne part d’annonces émanant d’établissements scolaires, milieu déjà familier des lycéens. Une façon de répondre à la « mobilisation générale » demandée par Nicole Belloubet, qui a elle-même voulu montrer l’exemple en publiant une offre de stage au ministère, pas du goût de tout le monde. « Madame Belloubet prend un collaborateur, mais quelles solutions pour les 599.999 autres ? », ironise Olivier Beaufrère, proviseur dans l’Essonne.

Pour le secrétaire national du SNPDEN-Unsa, syndicat majoritaire chez les chefs d’établissement, la plateforme ne réglera pas tous les problèmes. « C’est très frileux, et la vraie problématique est que tout a été sous-dimensionné et mal anticipé, regrette-t-il. Même le SNU est complet pour cette période. Il faut vraiment que tout le monde s’y mette si on veut répondre aux élèves notamment des territoires ruraux, ou qui visent des secteurs à l’employabilité difficile. »

Déjà une vingtaine de candidats… pour une seule place

C’est justement pour mettre le pied à l’étrier de certains jeunes intéressés par son secteur « très fermé » que Gwenaelle Dumont a déposé une annonce de stage sur le fameux site. Mais cette illustratrice nantaise ne s’attendait pas à recevoir « plus d’une vingtaine de candidatures » en quelques heures… La jeune femme a donc carrément dû s’improviser DRH et se lancer dans un processus complet de recrutement. « Je réponds à tous et je sélectionne les profils les plus adaptés, explique-t-elle. Je dois en rencontrer deux en fin de semaine. Pour les autres, j’ai mis en place une liste d’attente, même si désormais leurs chances sont très minces… »

A Quimper (Finistère), l’entreprise Armor Lux a quant à elle réceptionné dix dossiers en une journée, pour dix places dans ses différents métiers, de la production au commerce. « On a déjà beaucoup de candidatures spontanées mais c’est de notre devoir d’accueillir des jeunes, et pourquoi pas de susciter des vocations, détaille Grégoire Guyon, directeur de la communication de la célèbre marque de prêt-à-porter. Heureusement, nous avons quinze jours pour étudier tout ça. »

« Un stage kebab n’apportera rien »

Un embouteillage qui était à prévoir dans la mesure où contrairement aux stages de 3e, les dates choisies sont les mêmes pour tous, ne permettant pas aux élèves de tourner dans une même entreprise. « L’idée était intéressante sur le papier, mais si ça se transforme en stage kebab ou rangement de boîtes de petit pois, ça n’apportera rien », craint déjà Olivier Beaufrère, qui espère que le moins de jeunes possible restera sur le carreau. « Dans ma classe, la majorité n’a encore rien trouvé », assure de son côté Louise, une lycéenne qui vise, en vain pour le moment, le secteur de la communication et des médias.

Si les situations vont sûrement se débloquer pour certains, le ministère a déjà indiqué que les élèves sans stage devront être accueillis dans leur établissement scolaire, où ils effectueront « des recherches documentaires pour préciser ou parfaire [leur] projet d’orientation ». Mais qui pour les encadrer ? Car avec des lycées qui deviennent centre d’examen et des enseignants mobilisés sur la correction des copies du bac, pas sûr, là encore, que les calculs soient bons…

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