RECONSTITUTIONQu’attendre de la « mise en situation » 9 mois après la disparition d’Emile?

Disparition d’Emile : Une « mise en situation » organisée pour se « confronter au réel »

RECONSTITUTIONDepuis la disparition du garçonnet le 8 juillet 2023, aucune piste n’a réellement émergé, aucun suspect n’a été placé en garde à vue. Ce jeudi, une « mise en situation » est organisée au Haut-Vernet
Le petit Emile, 2 ans, a disparu le 8 juillet 2023 dans le hameau du Haut-Vernet. Une « mise en situation », sorte de reconstitution, est organisée ce jeudi.
Le petit Emile, 2 ans, a disparu le 8 juillet 2023 dans le hameau du Haut-Vernet. Une « mise en situation », sorte de reconstitution, est organisée ce jeudi. - Mourad ALLILI/SIPA / SIPA
Caroline Politi

Caroline Politi

L'essentiel

  • Emile, 2 ans, a disparu le 8 juillet 2023 au Haut Vernet, un petit hameau des Alpes-de-Haute-Provence où il passait ses vacances chez ses grands-parents. Sa trace s’est perdue vers 17 heures.
  • Une « mise en situation », sorte de reconstitution, est prévue ce jeudi. Le hameau a été bouclé et toutes les personnes présentes ce jour-là y participeront.
  • L’objectif de ce « transport sur les lieux », selon l’expression consacrée, est de confronter les éléments d’enquête au réel.

Rejouer la scène pour tenter de percer un mystère tenace. Ou, tout du moins, d’étayer certaines pistes. Ce jeudi, près de neuf mois après la disparition du petit Emile au Haut Vernet, ce hameau des Alpes-de-Haute-Provence s’apprête à revivre cet après-midi du 8 juillet 2023 au cours duquel le garçonnet de 2 ans semble s’être volatilisé. Tout le village sera bouclé, le temps que soit organisée une « mise en situation » à laquelle participeront les personnes présentes ce jour-là. Dix-sept personnes ont été convoquées, précise une source proche du dossier. A commencer par la famille du garçonnet, qui était alors en vacances chez ses grands-parents avec plusieurs oncles et tantes et les deux témoins qui disent l’avoir croisé dans la rue.

Dans le jargon, on appelle ça « un transport sur les lieux ». A la différence d’une reconstitution classique, il n’y a pas, dans ce dossier, de mis en cause. Malgré les moyens engagés - une vingtaine de gendarmes est mobilisée sur ce dossier - aucune piste n’a réellement émergé, aucun suspect n’a été placé en garde à vue. Il y a certes eu des perquisitions mais à l’heure actuelle, elles ne se sont pas avérées déterminantes pour faire émerger un scénario plutôt qu’un autre. L’enfant s’est-il égaré ? A-t-il été percuté par un automobiliste qui a ensuite dissimulé son corps ? A-t-il été victime d’un acte criminel ? « Aucune piste n’est écartée », répète inlassablement le parquet d’Aix-en-Provence.

« La situation telle qu’on la connaît aujourd’hui est partielle »

Dans ces conditions, impossible de faire rejouer la scène par le mis en cause ou un figurant, comme cela se fait dans les reconstitutions classiques. Leur but est de confronter au terrain les déclarations des uns et des autres, les expertises et autres éléments du dossier. « Ce sont des actes qui peuvent, par exemple, être très utiles lorsque les témoignages divergent ou lorsque les constatations médico-légales ne correspondent pas à la version du mis en cause », précise Jacques Dallest, procureur général honoraire. Quid alors de la mise en situation dans ce dossier hautement sensible ? « Il s’agit là aussi de confronter au réel certains éléments, poursuit le magistrat. La situation telle qu’on la connaît aujourd’hui est partielle, mais le dossier n’est pas vide pour autant. »

La trace d’Emile se perd peu après 17 heures. Deux témoins disent avoir vu l’enfant dans la rue principale du hameau, mais l’un affirme qu’il descendait l’artère tandis que l’autre assure qu’il la remontait. Des chiens spécialisés ont marqué sa présence à moins de cinquante mètres de la maison de ses grands-parents, avant de perdre sa trace. Un élément crucial mais pas déterminant pour autant : si l’enfant est passé récemment sur ces lieux, cela peut induire en erreur les animaux. Quant aux recherches, si elles se sont révélées vaines, les enquêteurs gardent en tête l’affaire Lucas Tronche : le corps de l’adolescent a été découvert six ans après sa disparition dans un ravin, à un kilomètre de son domicile, alors même que la zone avait été passée au crible.

Découvrir les lieux

Avec cette mise en situation, plutôt rare dans ce genre d’enquête, les magistrats devraient essayer de visualiser la scène, de voir si les déclarations des uns et des autres concordent, de tester certaines hypothèses. « Les juges d’instruction saisis du dossier n’ont pas encore été sur place. Ils ont bien évidemment tous les éléments du dossier, des photos, mais ce n’est pas la même chose de se faire une idée par soi-même, ne serait-ce que pour apprécier les distances », rappelle Jacques Dallest. Des pilotes de drones seront chargés de faire des images au profit des enquêteurs. Objectif: receuillir le maximum d'éléments pouvant servir les investigations.

S’il ne faut pas imaginer une résolution de l’enquête au cours de la journée, certains témoins pourraient également livrer des détails qu’ils avaient jusqu’alors estimé insignifiants. « La vérité ne va pas sortir d’un chapeau mais on n’est jamais à l’abri d’aveux, note l’ancien procureur. Ce genre de journée est souvent très constructive. »