ArgentQuand les animaux étaient responsables de leurs actes et jugés au tribunal

Quand les animaux étaient responsables de leurs actes et jugés au tribunal

ArgentAutrefois, les animaux aussi pouvaient être reconnus coupables de crimes et de délits, ce qui a donné lieu à des procès rocambolesques
Les animaux domestiques les plus jugés au Moyen Âge et à l'Époque moderne étaient principalement des cochons.
Les animaux domestiques les plus jugés au Moyen Âge et à l'Époque moderne étaient principalement des cochons. - iStock / City Presse / city_presse
M.K pour 20 Minutes

M.K pour 20 Minutes

Un loup sur le banc des accusés pour avoir attaqué un troupeau de moutons ? Ou un sanglier devant le juge pour avoir ravagé un champ ? Cela vous paraît absurde ? Et pourtant, durant près d’un millénaire, en Europe, les animaux – en particulier les bêtes de ferme et les insectes – étaient justiciables de leurs faits. En effet, contrairement au droit actuel, au Moyen Âge, l’animal était responsable de ses actes et non son propriétaire. Cette particularité juridique a ainsi donné lieu à de nombreux procès, excommunications, exorcismes publics, condamnations à mort et autres jugements par contumace. Retour sur des histoires aussi insolites que stupéfiantes…

Des cochons et des insectes sur le banc des accusés

Si la genèse des procès d’animaux se situe au début du Moyen Âge (on compte environ 17 cas jusqu’au XIVe siècle), c’est surtout durant la période des Temps modernes que cette pratique se démocratise. En effet, selon les historiens, entre le XVe et le XVIIIe siècles, le nombre de procès augmente significativement, et l’on dénombre, par exemple, 40 jugements rien que durant le dernier siècle. Ce n’est qu’après l’essor de la philosophie des Lumières que ces événements deviennent moins fréquents.
On observait alors deux types de procès : les premiers avaient lieu dans des tribunaux laïcs et concernaient majoritairement les animaux domestiques, tels que les cochons, les chevaux, les bœufs, les coqs, etc. Ces derniers étaient la plupart du temps jugés pour des blessures ou des homicides. Il est d’ailleurs à noter que 90 % des bêtes traduites devant la justice en Europe étaient des cochons. Selon les recherches des historiens, les porcs avaient en effet pour habitude de vagabonder aussi bien en ville qu’à la campagne, occasionnant donc régulièrement des accidents, tels que le pillage de boutiques, la dévastation de jardins et, plus grave, l’attaque de nouveau-nés. À l’issue de ces procès, les animaux pouvaient être innocentés, mais le plus souvent, ils étaient condamnés à mort (décapitation, bûcher, pendaison) ou soumis à des rituels d’humiliation et de mutilation.
Les animaux de petite taille, eux, tels que les insectes (limaces, sangsues…), grenouilles, reptiles, corbeaux ou les rongeurs qui détruisaient les récoltes, étaient davantage jugés par les autorités ecclésiastiques et condamnés à des exorcismes ou des excommunications.

Quelques procès connus

Prises très au sérieux, ces affaires ont donné lieu à des procès insolites, désormais bien connus. Le premier animal domestique à être jugé était un cochon, dénommé Porcel, traîné devant les tribunaux en 1266 près de Paris. En 1386, en Normandie, une truie renverse un bambin et le dévore au niveau des membres et du visage. L’enfant ne survit malheureusement pas à ses blessures et l’animal sera condamné à être traîné sur une claie, avant d’être pendu et brûlé.
Du côté des insectes, les archives évoquent les témoignages de l’évêque Barthélemy qui, en 1120, aurait déclaré maudits et excommunié des mulots et des chenilles qui avaient envahi les champs et les récoltes. Il fera de même quelques années plus tard… avec des mouches !

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