Trésor MARINDécouvrez l’ormeau, le caviar de la mer très prisé des pêcheurs à pied

Grandes marées : Connaissez-vous l’ormeau, le caviar de la mer très prisé des pêcheurs à pied ?

Trésor MARINAvec son goût unique, l’escargot de mer se vend à prix d’or. Mais sa pêche est extrêmement réglementée et l’ormeau ne se laisse pas facilement capturer
Très prisé par les pêcheurs à pied, l'ormeau ne se pêche que lors des grandes marées quand les coefficients sont supérieurs à 100.
Très prisé par les pêcheurs à pied, l'ormeau ne se pêche que lors des grandes marées quand les coefficients sont supérieurs à 100.  - D. Meyer / AFP / AFP
Jérôme Gicquel

Jérôme Gicquel

L'essentiel

  • A chaque épisode de grandes marées en Bretagne, les pêcheurs à pied aguerris partent traquer l’ormeau.
  • Avec son goût légèrement iodé et de noisette, la chair de ce mollusque marin est très appréciée et se vend à prix d’or.
  • Sa pêche est toutefois très réglementée pour préserver la ressource qui a failli disparaître à cause du braconnage.

Certains rempliront leurs paniers de palourdes, de coques ou de moules. D’autres de bigorneaux, d’étrilles ou de tourteaux pour les plus chanceux. Alors que les grandes marées sont de retour, avec des coefficients dépassant les 110, l’estran du littoral breton va encore être pris d’assaut par les pêcheurs à pied jusqu’à jeudi. Les plus aguerris iront traquer l’ormeau, un mollusque marin de la famille des gastéropodes qui est un peu la star des coquillages.

Car le caviar des mers comme on le surnomme ne se laisse pas facilement capturer. Vivant dans les zones rocheuses, toujours à proximité d’algues qu’il aime brouter, l’ormeau ne se pêche déjà que lorsque les coefficients sont supérieurs à 100. « Il faut aller au plus bas de l’estran pour pouvoir accéder à des rochers qui ne sont découverts que lors des grandes marées », indique Franck Delisle, directeur de l’association VivArmor Nature, qui sensibilise à chaque épisode les pêcheurs à pied sur les bonnes pratiques.

Un trésor des mers qui se mérite

Arrivé dans la zone de l’ormeau, habitué des zones côtières froides, le pêcheur devra aussi se mouiller avant de plonger ses mains dans les failles ou retourner les cailloux. « Il est souvent bien caché donc il faut avoir l’œil et un peu de chance aussi », assure Emmanuel Even. Né sur l’Ile-Grande mais vivant aujourd’hui à Paris, ce pêcheur à pied fait partie de la poignée d’initiés qui traque à chaque grande marée l’ormeau sur la côte de Granit rose. « C’est comme aux champignons, chacun a ses habitudes et les endroits qu’il connaît », sourit-il.

Pour prélever un ormeau, il faut que sa taille soit au minimum de neuf centimètres.
Pour prélever un ormeau, il faut que sa taille soit au minimum de neuf centimètres.  - F. Tanneau / AFP

Équipé d’une combinaison, d’un crochet et d’un filet, il a également toujours sur lui un poignard pour décrocher l’ormeau de son support rocheux. « C’est une pêche qui se mérite », prévient Franck Delisle. Car après ses efforts, il y a à la clé un trésor. Dans un entretien à Challenges, Loïk Le Floch-Prigent, ancien PDG de Elf et passionné de pêche à pied, assurait d’ailleurs que la pêche aux ormeaux était sa préférée. « Parce que c’est le fruit de mer le plus goûteux au monde, celui pour lequel je suis capable de faire le plus de kilomètres », indiquait-il en 2014.

Une pêche strictement réglementée

Avec son goût finement iodé et teinté de noisette, l’ormeau est en effet prisé des fins gourmets. Un produit de luxe qui peut se vendre entre 80 et 100 euros le kilo et que l’on retrouve à la table de prestigieux restaurants. A ce prix, l’escargot de mer suscite donc des convoitises et à chaque marée, des pêcheurs à pied peu scrupuleux se font prendre par la patrouille. « La pêche à l’ormeau est strictement réglementée pour préserver l’espèce car le braconnage et une maladie ont failli décimer les populations dans les années 1960-1970 », souligne Franck Delisle.

Tout pêcheur d’ormeau n’a donc le droit aujourd’hui que de ramasser vingt ormeaux par jour du 1er septembre au 1er juin avec une taille minimale de neuf centimètres à respecter. « Et la pêche sous-marine est interdite », poursuit le directeur de VivAmor Nature. Seuls quelques pêcheurs professionnels ayant une licence spécifique sont autorisés à pêcher l’ormeau en plongée comme Kénan Riou, installé à Saint-Quay-Portrieux. « On a le droit à un quota de 4,2 tonnes par an avec une pêche qui est autorisée de mi-septembre à fin mai, détaille-t-il. Et à chaque prise, on doit baguer l’ormeau pour s’assurer que l’ormeau a bien été pêché par un professionnel. »

On le voit, l’ormeau n’est donc pas à la portée de toutes les mains ni de toutes les bourses. Et une fois qu’on s’apprête à le déguster, encore faut-il le préparer. « Il faut le battre une vingtaine de minutes dans un torchon avec un marteau ou une cuillère pour attendrir sa chair car sinon c’est immangeable, prévient Emmanuel Even. Et après, je les fais cuire à la poêle avec du beurre, de l’ail et du persil et c’est un régal. Le goût est vraiment unique et inimitable ! »

Deux élevages d’ormeaux en Bretagne

Outre l’ormeau sauvage, traqué par les pêcheurs à pied, il existe aussi de l’ormeau d’élevage, plus tendre mais aussi plus cher. Seules deux entreprises en élèvent en Bretagne : France Haliotis à Plouguerneau (Finistère) et Groix Haliotis sur l’île du même nom dans le Morbihan.

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