ParasiteTrois pistes pour (enfin) éliminer le paludisme qui tue 500.000 enfants par an

Paludisme : Trois pistes pour (enfin) éliminer la maladie qui tue 500.000 enfants par an

ParasiteLe paludisme, appelé aussi malaria, est transmis à l’homme par certains moustiques. Les premières victimes sont les enfants de moins de 5 ans
Faith, 3 ans, vient de recevoir sa troisième dose de vaccin contre le paludisme, à Mukuli, au Kenya, le 7 mars 2023. (Illustration)
Faith, 3 ans, vient de recevoir sa troisième dose de vaccin contre le paludisme, à Mukuli, au Kenya, le 7 mars 2023. (Illustration) - YASUYOSHI CHIBA / AFP / AFP
Diane Regny

Diane Regny

L'essentiel

  • Ce jeudi, c’est la journée mondiale contre le paludisme, organisée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) depuis 2001.
  • Cette maladie, aussi appelée malaria, se transmet à l’être humain par les piqûres de certains moustiques.
  • Alors qu’elle tue plus de 600.000 personnes chaque année, dont l’immense majorité sur le continent africain, 20 Minutes se penche sur trois pistes d’élimination de cette maladie.

Malgré les progrès enregistrés, la « fièvre des marais » continue de tuer plus de 600.000 personnes chaque année. L’immense majorité des victimes du paludisme, qui se transmet à l’être humain par les piqûres de certains moustiques, se trouvent sur le continent africain.

« 76 % des victimes sont des enfants de moins de 5 ans, ce sont eux qui payent le plus lourd tribut », rappelle Sylvie Manguin, directrice de recherche à l’Institut de recherche pour le développement (IRD), rattachée à l’université de Montpellier. En cette journée mondiale contre le paludisme, 20 Minutes se penche sur les trois principales pistes pour éliminer cette maladie qu’on appelle aussi malaria.

Les moustiquaires imprégnées

Comme les moustiques qui transmettent le paludisme piquent la nuit, les moustiquaires constituent des alliés de poids contre la maladie. « Dans les années 1980, le Français Pierre Carnevale a eu l’idée d’imprégner les moustiquaires d’insecticides à base de pyréthrinoïde », rappelle Sylvie Manguin qui ajoute « cette idée a sauvé énormément de vies ». Entre 2019 et 2022, le projet New Nets a livré des millions de moustiquaires imbibées de deux insecticides pour lutter contre la résistance de certains moustiques à la pyréthrinoïde.

« Ce sont des moustiquaires avec un type d’insecticide en haut de la fibre et un autre en bas de la fibre afin de tuer même les moustiques résistant à l’un de ces produits », explique la directrice de recherche. D’après les bailleurs de fonds du projet New Nets, cette initiative a permis d’éviter environ 13 millions de cas et près de 25.000 morts en trois ans. « Les technologies ont beaucoup évolué, note Sylvie Manguin. Avant, on avait des pastilles et des seaux d’eau et on trempait les moustiquaires dedans. Aujourd’hui, au cœur de leur fibre même, elles ont des molécules insecticides. » De quoi permettre à de plus en plus de personnes de se protéger des piqûres de moustique.

Cap sur la vaccination

Mais pour se protéger, rien ne vaut les vaccins. « On parle d’un vaccin contre le paludisme depuis une centaine d’années mais on a réussi à le concevoir très récemment », souligne Sylvie Manguin. En 2021, le tout premier vaccin contre le paludisme, le « RTS, S », a enfin été recommandé par l’OMS. Puis fin 2023, l’organisation a donné son feu vert pour un second vaccin « sûr et efficace » pour les enfants, le R21/Matrix-M. « En tant que chercheur sur le paludisme, je rêvais du jour où nous disposerions d’un vaccin sûr et efficace contre le paludisme. Maintenant nous en avons deux », s’était alors émerveillé le patron de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus.

D’autant que « ces deux vaccins ont des niveaux d’efficacité très satisfaisants, autour de 75 % », se félicite Sylvie Manguin. Difficile toutefois d’imaginer éliminer le paludisme en se reposant uniquement sur ces injections. « La capacité des productions est relativement limitée pour le moment. De plus, les enfants doivent recevoir trois doses chacun puis un booster », note la directrice de recherche. De quoi freiner une couverture vaccinale optimale. D’autant que si « avoir un vaccin est formidable », ce n’est pas « la panacée » pour autant, rappelle Sylvie Manguin. « On l’a vu pour le Covid-19, les gens n’adhèrent pas forcément à la vaccination », glisse-t-elle.

Eduquer pour mieux soigner

Alors que, presque chaque minute, un enfant meurt du paludisme dans le monde, la prévention reste donc essentielle. Pour administrer le vaccin, il faut évidemment travailler sur l’adhésion de la population. « Confiance, religion… Pour mille raisons différentes, de nombreuses personnes refusent de se faire vacciner ou de faire vacciner leur enfant », rappelle Sylvie Manguin.

De nombreux pays africains sont toutefois très impliqués. En mars, onze d’entre eux se sont engagés à « mettre fin aux décès dus au paludisme » d’ici 2030. Fin janvier, le Cameroun – l’un des pays les plus touchés, a mis en place la première campagne mondiale de vaccination à grande échelle. « J’ai travaillé en Angola et ce sont les adultes qui dorment sous moustiquaires, pas les enfants, alors que ce sont eux qui risquent de mourir, se souvient Sylvie Manguin. Ils pensent qu’ils doivent être protégés des piqûres de moustiques pour éviter de tomber malade et ainsi continuer à travailler. »

Il est donc essentiel de sensibiliser la population alors que « près d’un demi-million d’enfants meurent chaque année en Afrique subsaharienne, leur système immunitaire n’étant pas assez développé pour combattre le parasite », rappelle-t-elle. La directrice de recherche à l’IRD souligne toutefois les progrès faits depuis plusieurs années : « L’Algérie, l’Argentine, le Belize… Depuis 2015, treize pays ont été certifiés sans malaria par l’OMS ! » L’organisation espère réduire la charge mondiale du paludisme de 90 % d’ici à 2030.

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