Moins chère, écologique, française… C’est quoi cette première fusée autophage ?
La course à l’espace•Deux ans après la création d’Alpha Impulsion, à Toulouse, les équipes vont procéder aux premiers essais au sol de la première fusée autophage. Sa propulsion est générée par la combustion de son fuselage. Une révolution tant économique qu’écolo
Lucie Tollon
L'essentiel
- Alpha Impulsion est une très jeune entreprise toulousaine née il y a deux ans avec pour dessein de reconquérir le leadership européen dans l’économie du spatial.
- La start-up a créé une fusée autophage qui se sert de son fuselage comme d’un carburant. Les premiers essais au sol auront lieu dans quelques semaines avant le premier tir mondial de la fusée.
- Cette technologie pourrait révolutionner la course à l’espace grâce à son modèle plus économique et plus écologique.
Alors que la Nasa cherche par tous les moyens à nettoyer l’Espace de ses déchets, la jeune entreprise toulousaine, Alpha Impulsion a trouvé une partie de la solution qui pourrait révolutionner la course à l’Espace : créer une fusée autophage. Une technologie de propulsion du lanceur dans laquelle la combustion du fuselage du véhicule spatial constitue le carburant.
« Nous sommes sur le point de faire aboutir une technologie imaginée dans les années 1920, mais jusqu’à présent irréalisable. Avec l’autophage, c’est la structure même du véhicule spatial qui assure une fonction de combustible et s’allège au fil du trajet vers son orbite. La fusée progresse dans l’atmosphère en se consumant à la manière d’une bougie. À la fin du vol, il ne reste que le moteur-fusée et le satellite, tout le reste a été consumé », explique Marius Celette, président d’Alpha Impulsion fondée il y a seulement deux ans. Cette innovation n’est possible aujourd’hui que grâce à l’arrivée sur le marché du polymère (biosourcé ou recyclé chez Alpha Impulsion), un matériel solide qui peut brûler. Ce polymère constitue alors la structure de la fusée et permet de devenir ce carburant intégré.
Une première mondiale en 2025
« Mais notre innovation va bien plus loin : afin de tirer le meilleur parti du moteur-fusée autophage, nous y avons associé la propulsion hybride. Celle-ci permet un très haut niveau de poussée, de 300 Kilonewtons dans le cas de notre lanceur orbital, ce qui est essentiel pour brûler rapidement la structure », ajoute le président.
La start-up va procéder dans le courant des prochaines semaines aux premiers essais au sol de sa technologie. Ces essais au sol sont le préalable au tir de la première fusée autophage de 3 mètres et 18 centimètres de diamètre, prévu courant 2025 sur une base de lancement européenne, et qui représentera une première mondiale.
40 % de réduction de l’impact environnemental
L’intérêt majeur de cette nouvelle technologie réside dans l’extrême simplification de l’architecture du lanceur. Le remplacement de la structure classique à étages par un fuselage-carburant réduit le poids total de la fusée de plus de 40 %. La suppression des composants devenus inutiles, tels que les réservoirs, systèmes de séparation d’étages ou encore moteurs supplémentaires, divise les coûts de production par cinq. Des réductions techniques et financières qui constituent la clé du modèle économique d’Alpha Impulsion, visant à rendre l’espace plus accessible aux acteurs du marché des satellites.
La conception innovante, plus légère, de son futur lanceur permettra une réduction de l’impact environnemental de l’ordre de 40 %, tout en réduisant le risque de débris, à la fois au sol et dans l’espace.
En début d’année 2025, la deeptech, implantée en Occitanie et en Italie, s’apprête à procéder à une levée de fonds de 8 millions d’euros pour amorcer sa phase d’industrialisation. D’ici une décennie, Alpha Impulsion entend se donner les moyens de devenir l’opérateur de services de lancement de petits satellites aux tarifs les moins chers d’Europe. Le premier vol commercial du futur lanceur Grenat est envisagé à l’horizon 2028.
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